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Situation - Panique à St. Madeline

4 participants
Le Phare
Porteur de lueur
Le Phare

Panique à St. Madeline

@Vitold Chokowski , @Enid Murdoch , @Sybil Blackwood

03.1994
tw : blessures
La fourmilière grouille. Minuscule société enfermée dans un unique bâtiment. L’hôpital de Malfearn ne paye pas de mine, à la hauteur de sa bourgade. Il est cependant le plus proche des alentours. Les malades et blessés y viennent de toute la région et on s’y affaire à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. Là, un enfant beuglant, le crâne percé d’une otite fulgurante, de l’autre côté, un pochard, l’arcade sanglante. Tombé sur le pavé, soutenu par des amis tout aussi ivres. D’un côté a braille et de l’autre ça glousse.

Dans ce chaos, Valentine tente de garder les pieds sur terre. Bien droite à l’accueil, le nez dans ses registres, elle sourit, dirige, oriente, rassure. Petite trentaine bien tassée, pas plus jolie qu’une autre, un éclat vif dans le regard, les cheveux en un rien de désordre sous sa pince en plastique. Jules l’attend à la maison, sûrement que la fille Wakins l’a déjà mis au lit à cette heure. Brave gamine. Responsable avec ça. Valentine n’a confiance qu’en elle pour garder son précieux petit gars. Ce soir, elle est de garde, l’esprit léger. Mais toujours tourné vers la petite tête blonde de son cœur.

Une soirée de plus à réparer petits et gros bobos. Les médecins filent à toute hâte. Parfois, un brancard traverse le couloir. Si St Madeline n’accueille pas les cas les plus graves, les gens du coin recèlent d’inventivité pour se fracasser en tous sens. « Oui Madame Dale, je comprends, mais le docteur est occupé en salle de réveil, je peux demander à une infirmière de vous faire un petit check-up si vous le souhaitez et- »

Madame Dale ne veut rien entendre. Ne jure que par son cardiologue habituel, persuadée qu’en grand mal la guette. Valentine s’en voudrait de tout à fait la repousser –on n’est jamais assez trop prudents – mais se retrouve bien embêtée en ce soir d’agitation. Dans le coin, le petit malade braille de plus en plus et, à nouveau, ses pensées vont à Jules niché dans son lit d’enfant. Puis les ivrognes renchérissent. Le sparadrap apposé à l’arcade du blessé ne suffit plus à retenir le saignement. Valentine, planquée derrière son comptoir, se trouve de plus en plus mal à l’aise.

Le néon, au-dessus du tumulte, tangue de plus en plus bruyamment. Elle ne sait rien des subventions, des fonds alloués à la structure, mais les temps sont durs et quelques endroits de l‘hôpital de plus en plus vétustes. Cela bourdonne à son crâne.

Pourvu qu’il tienne le coup, songe-t-elle.

Pas besoin d’une autre catastrophe ce soir. Pourtant, l’instinct toujours. Le même que la force à tenir bond. Ne pas rejoindre Jules immédiatement. Et le chaos, toujours, plus fort que jamais ce soir, pour une raison qui lui échappe.

Et le néon de la narguer davantage, redoublant l’intensité de son mal de crâne. « Qu’est-ce que je peux faire pour vous ? » Qu’elle lance mécaniquement au visiteur suivant.



Hors RP




Voilà enfin le lancement de votre situation ! C'est un début tranquille pour vous permettre de placer vos personnages dans l'action. Vous êtes libres de poster comme bon vous semble et autant de fois que vous le souhaitez jusqu'au 5 Janvier où la suite vous sera envoyée.

Vous pouvez également interagir et faire interagir les PNJ présents à votre guise.

Valentine - Elle travaille à l'accueil de l'hôpital. Maman d'un petit garçon, elle est de garde cette nuit et pourra interagir avec vous au besoin.

Le groupe d'ivrognes - L'un est blessé à l'arcade et les autres l'accompagnent en attendant l'arrivée d'un médecin.

N'hésitez pas à inventer et faire intervenir d'autres PNJ à votre convenance.

Comme toujours, nous sommes disponibles par mp pour vous aiguiller au besoin et quelle que soit la question. À bientôt !
Sybil Blackwood
Sybil Blackwood

Panique à St. Madeline

@Vitold Chokowski , @Enid Murdoch , @Sybil Blackwood

03.1994
tw : mort, blessures
Ce que Sybil a toujours aimé à l’hôpital c’est que c’est une tornade dont elle maîtrise les bourrasques. Sybil aime les tornades, elle aime ce déchaînement d’activité continuel, comme un courant puissant. Chacun sait où il va, ce qu’il fait. Et elle, elle sait se mouvoir parfaitement dans cette danse chaotique. Sybil se sent reine en son royaume.  C’est bien le seul endroit qu’elle maîtrise encore. Le seul endroit où elle se sait utile. Elle y connaît ses compétences et sa valeur. Ell est le docteur Blackwood, tout y est plus simple.
Elle aime aussi les murs blancs, vierges comme des toiles. Elle aime l’odeur si particulière de désinfectant qui couvre à peine subtilement l’odeur tenace de la maladie.

Le labo de médecine légale est souvent vide et silencieux, la tornade manque à Sybil. Alors régulièrement, après ses journées, la nuit, le jour, le docteur Blackwood vient donner un coup de main aux urgences. Cela devrait la rendre sympathique à ses collègues pourtant sa présence les met mal à l’aise. Certains sont reconnaissants d’avoir une aide bienvenue, d’autres préféreraient ne pas avoir d’aide du tout si c’est pour plomber l’ambiance. C’est vrai quoi, le Docteur Blackwood est compétent, personne ne le nie, mais elle fait peur aux patients, elle n’a aucun tact pour les annonces diagnostics, elle ne rigole pas aux blagues, elle répond froidement et se permet de repasser derrière des docteurs. Certaines agentes d’accueil la surnomment Docteur Strangewood ou Robot Doctor dans son dos. Cela fait presque 3 ans qu’elle travaille là et pourtant elle semble n’avoir aucun ami.

La journée avait été calme et froide au labo, quelques consultations de victime, finir des rapports administratifs et répondre aux fax du procureur sur le dernier cadavre indigent récupéré au sud du pays, une crise cardiaque finalement, rien de criminel. Sybil récupère son stéthoscope, otoscope, son stylo, son carnet et se rend aux urgences voir s’il y a du monde. Elle remonte sa fine monture dorée pour ajuster ses lunettes. Cette fois-ci c’est un chignon dont pas un cheveu ne dépasse. Ses talons claquent sur le sol dur et sale de l’hôpital. Couloir jaune, trois portes battantes, le bruit des urgences arrive à ses oreilles avant même qu’elle ne tourne sur le bon couloir.

« Bonsoir Valentine. »

Sybil essaye de se souvenir de chacun. Valentine c’est facile car elle apprécie son professionnalisme. Valentine sait reconnaître les urgences, Valentine ne chuchote pas dans son dos car elle bosse comme une dingue, elle n’a pas le temps pour les rumeurs. Ce soir, Valentine a des cernes sous les yeux, elle donne d’elle-même à chaque nouvelle entrée. Sybil sait reconnaître une maman fatiguée quand elle en voit une mais Valentine n’est pas une patiente et Sybil n’est pas du genre à plaindre ses collègues. Elle glisse cependant derrière le comptoir une plaquette de paracétamol alors que Valentine est en train de répondre à un groupe qui sent fortement l’alcool.
Le néon qui grésille et tangue, Sybil n’y fait pas attention. Tous les néons grésillent quand elle est là.

Passant derrière le comptoir, Sybil scrute la liste de patients présents, pris en charge ou non, dans la salle d’attente. Il ne lui suffit que d’un coup d’oeil pour savoir de qui elle va s’occuper en premier. Elle montre de son index une ligne « Femme trentaine, bagarre, coup à la tête ?? , traumato au nez. » et dit doucement mais fermement :

« Je m'en occupe. »

Pourquoi elle en premier ? Les coups à la tête peuvent générer des traumatismes crâniens, traumatismes qui peuvent vite dégrader l’état d’un patient. Le reste des patients sont en urgence modérée, les risques sont plus faibles. Elle n’a pas besoin de l’expliquer. Elle appelle la patiente, la fait rentrer dans un box vétuste.

«  Bonjour, je suis le Dr Blackwood. Dites-moi comment vous vous êtes fait ça ?  » dit-elle en désignant le nez ensanglanté de la jeune femme.

Elle prendra ensuite quelques éléments d’identité pour sa fiche patient avant de procéder à l’examen clinique pour déterminer si des examens complémentaires seront nécessaires
Lorsque la patiente, Enid Murdoch, lui dit au détour de son histoire qu’elle travaille au Ragged Baron, le sang déjà froid de Sybil se glace dans ses veines. Docteur Blackwood reste impassible, Sybil se tend. Elle se sent comme un dentiste dans la gueule d’un requin. Sybil se tait, le temps que le Docteur Blackwood finit son diagnostic. La jeune femme, pourtant plus vieille que Sybil, est ralentie, elle ne suit pas bien des yeux le doigt que lui présente Sybil même si le plancher orbital ne semble pas fracturé, ses réflexes sont amoindris. Elle n’a pas de nausées pour l’instant mais Sybil sait bel et bien qu’elle doit avoir un traumatisme crânien. Elle touche doucement, contraste avec la sécheresse de sa voix, de ses doigts froids autour du nez de la patiente. Sybil en profite pour nettoyer le sang d'une compresse. Elle passe de l'alcool, ça devrait piquer mais la patiente semble en avoir vu d'autres.
Il va falloir qu’elle passe au scanner. De toute façon son nez a l’air cassé, donc elle devra aussi passer par l’IRM. Mademoiselle risque d’attendre un bout dans la salle d’attente le temps qu’on l’appelle pour ses différents examens, qu’ils soient vus par un médecin et qu’elle reparte avec l’ordonnance. De toute manière il vaut mieux qu'elle reste en surveillance à l’hôpital ces quelques heures. Elle sera à portée de vue si son état s'aggrave.

«  On va vous rappeler pour le scanner et l’IRM. Vous pouvez attendre dans la salle, si vous ne vous sentez pas bien prévenez immédiatement l’accueil.  »

Retour en salle d’attente. A qui le tour ? L’enfant à l’otite ? Non Sybil n’a pas la force et elle n’est pas bonne avec les enfants, elle veut bien aider mais tout de même. Le groupe de SDF dont celui avec une arcade ouverte ? L’homme à la quarantaine qui se tient le ventre ? La personne âgée avec une plaie saignante ? Va pour l’homme.
Rebelotte, présentation sommaire, fiche patient, auscultation, ordonnance, retour. Sybil n’émet pas de jugement mais le diagnostic est léger pour les gémissements de souffrance que l’homme a poussé. Une légère intoxication alimentaire, pas même un vomissement.
Sybil a le choix entre les bruyants SDF qu’elle voit discuter de manière véhémente avec la patiente Murdoch. Intérieurement Sybil soupire, il ne faudrait pas qu’elle se batte de nouveau, ça aggraverait son cas. Encore plus intérieurement, Sybil s’amuse en s’interrogeant sur le vainqueur d’une lutte entre une jeune femme seule avec un trauma crânien et 4 vieux SDF complètement ivres.

«  M.Chokowski ?  »

Pas commun. Pourquoi c’est le voisin du patient qui se lève ? Ah un accompagnant.

Box 3 libre, elle fait allonger la personne âgée. Il a de la chance, elle est douée en suture. Rapide et soignée. Elle commence à parler au patient. Sa voix est claire mais neutre.

«  Bonsoir Monsieur ?  Comment vous êtes vous ouvert ? »

Elle allonge le monsieur, observe la plaie, pas jolie. Ses gestes sont précis. Il va falloir redésinfecter la plaie pour faire une belle suture, un beau pansement. Le Docteur Blackwood aime le travail bien fait, propre et carré. Elle n’est pas du genre à faire la causette mais elle a quand même observé le jeune accompagnant. Il dégage une aura qui intrigue Sybil, un je ne sais quoi qui rassure la Sybil intérieure. Tout à fait l’inverse de la première patiente. Il a l’air jeune, étranger, son regard est pénétrant. Il a l’air dans un autre monde, plus sombre. Un monde que Sybil connaît. Mais le docteur Blackwood travaille et n’a pas le temps d’écouter Sybil. Elle enregistre juste les informations. Et ses zygomatiques se détendent. Un sourire ? Oui, c’est bien un embryon de sourire qui plane cependant sur les lèvres du Docteur Blackwood. Une suture propre, un étranger étrange, un papi incompréhensible. C’est ce chaos qu’elle préfère.



Hors RP




Je commence ! J'ai vu avec vous deux pour les situations de départ mais si quelque chose ne vous va pas, je peux bien évidemment changer. Dites le moi si quelque chose ne colle pas avec votre idée !
Enid Murdoch
Enid Murdoch

Panique à St. Madeline

@Vitold Chokowski , @Enid Murdoch , @Sybil Blackwood

03.1994
tw : blessures, vulgarité, description graphique
Elle l’aime pas.
La toubib.

Ses grands airs de péteuse bourgeoise et son silence embarrassant.

Y’a un truc qui cloche, comme la saveur doucereuse d’une dent gâtée. Ca lui tord les tripes sans qu’elle sache si c’est la présence hiératique de la femme qui lui file la gerbe ou la beigne que lui a administré le Confiseur pour l’envoyer saluer le Vieux.

Elle se laisse faire, Need. C’est pas comme si elle a le choix.  Faut qu’elle retourne voir Ben rapidement. Faire le point. Alors, elle s’accroche à la douceur d’une main gantée de plastique mort, occultant la voix vipérine.

Le jardin d’Eden / La Tentation / Le Péché Originel.

Elle peut pas s’empêcher d’y penser.

Au Serpent. Elle met ça sur le compte du traumatisme, de son nez amoché, à la douleur cuisante qui lui vrille le crâne. Alors, elle parle. Du Ragged. Elle radote, sur les histoires qui hantent les murs lépreux du pub. Elle s’interrompt souvent parce qu’en face, la doc, elle s’en tape le coquillard avec une babouche de tout ce qu’elle baragouine doucement.

Puis, c’est fini.

Retour sur la chaise en plastoc inconfortable. Ca lui rentre dans le dos, dans les côtes, là où des hématomes aussi large que la Manche sont en train de se former. Ca commence doucement à l’emmerder.

Les néons. Le bruit. L’odeur de vinasse, de pisse et de rat crevé. Celle de l’antiseptique et de maladie.

Ca lui rappelle le Centre.

Enid, elle lutte contre la marée qui prend vie dans son estomac. Le ressac de sensation la secoue mais elle tient bon. C’est avant que le groupe d’ivrognes qui mouille à bâbord l’invective. Grossiers. Tous. Des porcs. Pas moins.

Un jour normal, elle leur aurait fait ramasser leur arrogance avec leurs doigts cassés. Pas ce soir, alors qu’elle est pas sûre d’assumer. La tension fait grésiller l’air. Ca sera à qui fera le mauvais pas. A qui fera sauter le bouchon et déversera l’écume de la violence.
IRM. Une chaise roulante est poussée devant elle. Dans son dos, ça s’agite. Elle part sur un majeur brandi ostensiblement.

Qu’ils aillent tous se faire foutre.


Vitold Chokowski
Vitold Chokowski
« Oué oy oté heul »
« Evidemment que non tu n’aurais pas pu t’en occuper seul. »

La voix de Vitold est un étrange murmure qui surpasse pourtant sans difficulté le tumulte de l’accueil de ces urgences. Aux côtés de l’ivrogne au visage ensanglanté, quelques uns de ces amis le singent en silence, dans des propos peu discrets qui le font tiquer légèrement. Costume noir, cheveux sombres, teint mat, profil de prêtre pour une église trop stricte, Vitold est aux côtés d’un Crapaud qui fait peine à voir. Le vieil homme, avec sa chemise à carreaux en flanelle et son pantalon usé jusqu’à la corde, tient d’une main l’autre et le bandage serré que Vitold s’est appliqué à lui faire. Quand la voix de la jeune docteure retentit, c’est lui qui se lève, en protecteur immense, de tout son mètre 90.

« Docteure. » Qu’il salue, paisiblement. « C’est pour mon aide, Sébastien Crapaud. Si cela ne vous dérange pas, je vais traduire. Il a du mal avec notre langue. » « Com hang d’mair de » « Il vous remercie. » Le mensonge est facile, la traduction aurait jeté un froid. Crapaud se traine, s’allonge, avec sa gueule ravagée par son ancienne blessure de chasse. Le gamin qu’il croise se met à hurler de plus belle. Voilà pourquoi Crapaud ne voulait pas aller à l’hôpital.

A 76 ans il en a marre des coups d’œil sur son visage à moitié arraché et sa somptueuse balafre.

« Il coupait la haie et la cisaille lui a entaillé l'index à la deuxième phalange. La blessure était trop profonde pour mes instruments. Nous avons préféré venir. » « Oué oy oté seul » « Avec du fil épais et une vieille aiguille à coudre ? » « Aha uér tom aha uér » « Mais nous ne sommes pas en guerre, Crapaud. »

Crapaud renâcle, tend vaguement la main. Il doit peser au maximum 45 kilos et ses cheveux blancs virent au jaune pisseux. Belle touffe néanmoins, pour quelqu’un de son âge. L’œil bleu n’a pas quitté la jeune femme blonde. L’autre a du mal à s’ouvrir sous sa paupière massacrée.

Ca se méfie quand Vitold tente d’avoir un aspect plus avenant, à défaut de sourire.

Mine de rien, il est inquiet. Et le col de sa chemise porte une goutte de sang en médaillon.
Le Phare
Porteur de lueur
Le Phare

Panique à St. Madeline

@Vitold Chokowski , @Enid Murdoch , @Sybil Blackwood

03.1994
tw : blessures
Valentine n’est pas différente des autres. Elle détourne le regard à l’arrivée de l’homme massacré par l’accident de chasse et celui - effilé - qui l'accompagne. Sourire de façade, comme toujours. Accueillir, orienter, servir. À l’angle de sa vision, une jeune femme est embarquée en fauteuil. Direction l’IRM. Elle n’a le temps que d’entrevoir son geste vulgaire, entendre piailler les ivrognes en réponse.

L’espace d’un instant, elle craint que cela ne dégénère. Que même la présence du docteur non loin n’y change rien. Qu’elle ait, par-dessus l’angoisse, à gérer un pugilat général ce soir. Valentine n’a jamais été armée contre ces choses-là.

Ça s’échauffe déjà quand un geignement s’élève par-dessus la cohue. C’est le plus ivre des trois. Il se crispe, se tient le ventre, lâche une nouvelle plainte. Valentine craint qu’il ne vomisse là, sur le carrelage impeccable de l’accueil. L’inquiétude est telle qu’elle ne remarque pas immédiatement comme la plainte se mue en cri. Un véritable mugissement. Glacial. À en faire taire les deux autres zouaves sur le coup. Il leur faut un bref instant avant de se courber sur leur ami, s’enquérir de son état, lui souffler des encouragements et des phrases pleines de compassion.

Un second médecin s’en vient, la première déjà bien occupée avec l’homme au visage froissé. Ça s’active de toutes parts. Bien sûr, le cri inquiète. La douleur est soudaine, démesurée par rapport à son état lors de l’arrivée. Il ne peut plus se lever, renifle comme un enfant. Ah, ils vont devoir amener le brancard, songe Valentine tout à mal.

Dans tout ce désordre, elle sent son cœur se serrer davantage. Décidément, quelque chose ne va pas et il lui tarde de rentrer. Mais ses foutus pieds sont ferrés au sol de cet accueil. Jusqu’à ce que l’heure exacte de son départ lui soit offerte par la large horloge de l’entrée.

Et tandis qu’on embarque le braillard, qu’on examine non loin, que la femme est embarquée sur son fauteuil roulant, là, comme un rien, la lumière s’éteint.

Comme un dieu farceur aurait soufflé une bougie.

Une seconde de torpeur. Même l’ivrogne a cessé de hurler subitement. Il demeure là, glacé, vissé à son brancard. Il tremble. Valentine est tétanisée. Une peur du noir ancestrale, vissée à ses tripes. Elle qui pensait pourtant être devenue une grande fille en devenant mère. Puis le cri reprend. Le type convulse. Elle cherche quoi faire de ses dix doigts. La grogne monte des salles d’examens et de chaque pièce.

Dans la pénombre, on y voit plus grand-chose et la voix d’un infirmier s’élève. Il lui semble qu’il s’agit de Doug. Un gars chouette. À toujours lui proposer un cinéma et lui sourire. Elle ne sait pas bien pourquoi. Ou plutôt ne veut pas le savoir. « Le générateur n’est pas supposé se déclencher ? »

En cas de panne, si. Normalement. Si l’endroit ne tombait pas à demi en ruine. Si on lui filait un peu plus de budgets, un peu plus d’aide. Mais sûrement que Sinclair a mieux à faire. C’est presque robotique, qu’elle quitte son accueil. Dodeline d’une jambe sur l’autre et heurte maladroitement le fauteuil de la femme agacée. « Excusez-moi- »

Dans le noir, il lui semble que son épaule effleure celle de Doug. « Il alimente sûrement juste ce qui est nécessaire. Pour les opérations, les respirateurs… »

Et certainement pas eux, les laissés pour compte à l’avant-poste. Valentine serre un peu plus les pans de son gilet. Il lui semble subitement que l’air s’est refroidi.


Hors RP




Voilà la suite de votre situation. Vous êtes libres de poster comme bon vous semble et autant de fois que vous le souhaitez jusqu'au 19 Janvier où la suite vous sera envoyée.

Vous pouvez également interagir et faire interagir les PNJ présents à votre guise.

Comme toujours, nous sommes disponibles par mp pour vous aiguiller au besoin et quelle que soit la question. À bientôt !
Sybil Blackwood
Sybil Blackwood

Panique à St. Madeline

@Vitold Chokowski , @Enid Murdoch , @Sybil Blackwood

03.1994
tw : mort, blessures

S’il y a un seul mot que Sybil a cru comprendre dans le baragouinage de l’homme à la gueule cassée, c’est un mot français très connu. Un mot qu’elle a appris en dehors des salles de classe. «Merde » , et Merde ne signifie certainement pas merci mais… ce n’est pas son problème. Un patient est un patient, et son traducteur est poli, ce qui lui suffit amplement. Elle ne lui répond même pas qu’elle parle français, car elle ne comprend pas la gueule cassée, elle croit seulement deviner un mot. De toute façon il n’y a rien à répondre alors elle ne répond rien. Le jeune homme lui a donné les informations nécessaires et ne lui a posé aucune question. Le jeune homme est beau, une peau mate, aussi bronzée que celle de Sybil est diaphane, des cheveux aussi sombres que les siens blonds. Il est grand, élégant dans des vêtements rustiques. Il a l’air étrange mais posé. Les voir l’un à côté de l’autre aurait pu ressembler à une incarnation du Yin et du Yang. Pourtant quelque chose semble les lier, comme s’ils étaient un peu à côté de ce monde.
Le patient est défiguré d’anciennes cicatrices. En chirurgie esthétique de la face, à Londres, on pourrait arranger ça mais cela demanderait du temps et des souffrances pour reprendre une vie normale après une telle opération. Ce n’est pas son problème, il a fait un choix, celui de vivre avec.

« La blessure est profonde. »

Sybil observe ce doigt à demi arraché et ensanglanté, ni colle ni suture ne pourront aider cette plaie. D’ailleurs le doigt pend, ce qui signifie que l’articulation a dû être sectionnée. Il devrait être opéré tout de suite mais Sybil doute que quelqu’un soit disponible et qu’ils sachent s’occuper de chirurgie de la main, une chirurgie délicate et complexe. Ce n’est pas de la prétention se dit-elle, c’est du réalisme, St Madeline n’est pas un grand hôpital londonien, ils font avec les moyens du bord. Parfois mieux que les urbains de la capitale. Son regard s’éclaire. Ses doigts frétillent. Elle a toujours aimé l’opération, la concentration, le défi que ces actes représentent. Cela fait quelques mois qu’elle n’a pas opéré mais elle peut essayer au moins de récupérer l’articulation, la raccrocher au doigt et le maintenir pour ensuite, une fois quelques tissus reconstruits, procéder à une suture. Un demi sourire flotte sur ses lèvres, il y a peu de choses en ce monde qu’elle ne préfère à cette stimulation intellectuelle, ce défi à son talent.
Sa voix est douce quand elle s’exprime en regardant M.Crapaud droit dans l’oeil, sans ciller. Son apparence à elle, sa véritable apparence, est sans doute bien pire que celle de cet humain, alors qui est-elle pour juger.

« Monsieur Crapaud, vous avez sectionné des tissus, de la chair mais aussi l’articulation. Soit vous attendez et vous passerez au bloc le plus vite possible. Soit je vous anesthésie localement le bras, et j’irai dans la plaie rattraper votre articulation pour la… comment dire, la raccrocher en quelque sorte. C’est comme un élastique qui aurait sauté. Je dois vous prévenir que cela pourrait quand même vous faire mal, et cela vous fera mal lorsque vos nerfs se réveilleront que vous passiez par l’opération en bloc ou avec moi. Je ne peux non plus vous promettre que je réussirai à 100 %. Ensuite selon l’opération vous devrez prendre le temps de cicatriser et guérir. En chambre ou chez vous. Vous avez le choix. »

C’est à lui de décider, de lui faire confiance ou non. Malgré une apparence frêle, Sybil a ce regard aussi tranchant que de l’acier.

Le vieux français fait son choix. Le risque, la solution rapide, la confiance. Sybil s’installe, commence ses gestes précis, ferme bien la porte, ferme son esprit, entre dans son monde. Elle ne demande personne, elle préfère être seule, au pire ce grand gaillard lui donnera un coup de main.

« Ne bougez pas. Respirez le plus calmement possible. »

Elle cale la main devant elle avec ses deux mains glacées à travers les gants. Elle place ses lunettes sur son nez. Sa main seule bouge, le reste de son corps est immobile, aucun tremblement, aucune respiration ne semble sortir de son corps. Aucun bruit, aucune image ne lui parvient. Elle manipule la main, fait passer doucement son crochet, bouge sa lampe du pied. Son expression devient plus naturelle, moins déformée par sa défiance envers les relations sociales, elle en paraît presque adoucie.
Sybil, et cela se confirme depuis sa transformation, n’a aucune difficulté à voir dans le noir, comme si elle ressentait plus qu’elle ne voyait. La panne de courant ne lui fait ni chaud ni froid, et par miracle son patient ne bouge pas non plus. Elle attrape enfin cette articulation  récalcitrante  qui se cache et lui échappe depuis quelques minutes et doucement, presque élégamment la tire petit à petit jusqu’à son emplacement habituel, accrochée à l’os.
La vague de froid ne l’avait pas atteinte non plus, son univers à elle était froid de toute manière et cela faisait des années qu’elle avait abandonné l’idée de se réchauffer.
Elle lève alors la tête et se rend compte que quelque chose cloche. Déjà ça hurle, plus que d’habitude, dans la salle d’attente. Ensuite il fait tout noir. Le Dr Blackwood fronce les sourcils, quelle est cette plaisanterie encore. Décidément difficile de travailler dans des conditions décentes à l’hôpital.

« Cela fait longtemps que … Bon, ça ne fait rien, je vais voir ce qu’il se passe. »

Elle se lève puis se rappelle qu’il faut au moins bander le doigt. L’os n’étant pas cassé aucun tuteur ne devrait être disponible mais elle veut éviter que l’articulation déjà partiellement déchirée ne se rétracte de nouveau. Elle a du sang plein les gants d’ailleurs. Comme un tour de magie mêlant gaz, bandage et désinfectant elle immobilise le doigt dans la prolongation de la main. Puis elle essuie une goutte de sueur, cela faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas sué mais elle n’a pas le temps de s’en inquiéter.

« M. Chokowski, M.Crapaud, pas de mouvement brusque s’il vous plaît, je ne voudrais pas devoir tout refaire. »

Et elle revient dans la salle d’attente, évitant de se prendre les pieds dans quelque chose. Les urgences sont presque à l’arrêt. Il fait sombre. Elle discerne l’accueil, se guidant avec les doigts, glissant jusqu’à l’accueil. Valentine n’y est plus.
Sybil ne sait pas bien ce qu’elle devrait faire, elle n’est pas informaticienne ni mécanicienne, elle est médecin. Alors, réflexe bidon et un peu suicidaire, elle pense à sa première patiente, espérant qu’elle n’est pas partie. Elle semblait souffrir de la tête, peut-être que l’obscurité lui fait du bien, peut-être a-elle perdu connaissance dans un coin. Sybil hésite à l’appeler dans l’obscurité mais une timidité ,mélangée à une indifférence pour l’espèce humaine et un reste d’instinct de survie pour cette hurleuse bagarreuse, l’étreint.



Hors RP


Bon, on va dire que médicalement ça tient la route aha 3944349029 ...

Enid Murdoch
Enid Murdoch

Panique à St. Madeline

@Vitold Chokowski , @Enid Murdoch , @Sybil Blackwood

03.1994
tw : blessures, vulgarité, description graphique
Ca commence toujours par un hurlement.

Enid a regardé suffisamment de film d’horreur pour savoir comment ça va se dérouler. Alors, quand la lumière est mouchée d’un coup, par la main invisible du destin, elle s’autorise même pas un haussement d’épaule. C’est qu’elle serait guère étonnée si le bide du poivrot s’ouvrait, sous les yeux ébahis de l’assistance, comme une banane trop mûre. Son esprit fertile, il part dans tout un tas d’éventualités morbides – mais elle serait pas contre un face à face avec Sigourney Weaver, si vous voyez ce qu’elle veut dire.

Ca la bouscule un peu du côté du fauteuil. C’est la secrétaire – une gentille dame, bien comme il faut – qui vient de lui rentrer dedans, lui est avis qu’elle ne voit pas grand-chose hormis la signalétique blafarde qui marque les issues de secours. Quant au brancardier qui devait la prendre en charge, il est resté figé, comme pris dans le bloc de gelé de l’angoisse, alors, Enid, elle voudrait bien descendre de son trône dans le but d’en savoir plus.

Parce qu’il y a un truc qui pue. Et c’est pas le clodo et sa bande de gueux dont elle cause. D’autant plus, qu’avec son nasigère ensanglanté, elle serait bien infoutu de humer l’air même si c’était pour y déceler une fragrance aussi – prenante.

« Faudrait songer à payer vos factures. Vu l’argent que vous extorquez à nous tous, vous pourriez au moins faire l’effort de nous mettre le chauffage et l’électri…» Elle dit ça à la cantonade parce que la panique ambiante, ça lui donne des envies de fanfaronnade. Juste pour faire taire les voix sourdes qui grésillent à l’arrière de son crâne et qui lui ordonnent de tirer son joli petit cul de là avant que ça vire à l’eau de boudin. Mais, ce sont les convulsions du zigue, harnaché à son brancard, qui lui ont fait fermer sa gueule – puis la migraine aussi. C’est qu’il a l’air complètement possédé avec ses yeux qui roulent dans leurs orbites – elle ne perçoit que la blancheur veinée d’écarlate de ses sclérotiques. Y a aucune gnôle de sa connaissance qui est capable de faire ça. Manquerait plus qu’il se pisse dess…

C’est fait. C’est le dégoût de l’assistance qui lui indique pendant que le gus continue de danser la gigue sur son lit de deuil. Enid, elle y connait rien en premier secours. Enfin, elle sait recoudre une plaie au fil de pêche et soigner des côtes cassées parce qu’il suffit de serrer suffisamment les dents le temps que ça se répare tout seul – mais y a rien à faire, le clochdu, il continue de faire claquer ses os comme un jeu de castagnettes et y a personne pour lui porter secours.

Alors, dans l’ambiance générale de fin du monde, Need se dirige en tâtonnant, parce qu’il fait noir et que les vertiges menacent de l’engloutir, vers la salle d’examen du bon docteur Jekyll.  Le snobisme était certes un trait de caractère détestable, mais les docs, ils faisaient tous un serment, non ? Elle allait pas laisser ce pauvre type – aussi vulgaire soit-il, crever au milieu des urgences.

« Doc, va falloir que vous aidiez ce type. Il fout les jetons à tout le monde, et la peur, c’est comme la gastro – si vous la laissez progresser, vous allez vous retrouver dans une merde noire, très vite. »

La jeune Murdoch s’accroche à l’épaule du médecin et comprend confusément que son contact révulse Sybil. Il y a une certaine forme d’angoisse qui émerge derrière une froideur protocolaire. Elle n’y attache pas d’importance, pour le moment, parce qu’il fait nuit et que les monstres rôdent quand le Soleil chute.
Le froid s’est intensifié. L’obscurité semble se faire plus profonde alors que ces mots passent ses lippes abîmées. Dans les profondeurs du couloir, un sanglot étranglé se fait entendre ou est-ce un gémissement fou, nul ne saurait le dire.

« Il faut remettre la lumière en route. »


Sybil Blackwood
Sybil Blackwood

Panique à St. Madeline

@Vitold Chokowski , @Enid Murdoch , @Sybil Blackwood

03.1994
tw : mort, blessures

Malgré les cris, les pleurs, les grésillements des néons fatigués, le cliquetis du brancard métallique contre le mur secoué par les convulsions de cet homme, ce brouhaha, ce quelque chose dans l'air qui tend tout le monde, Sybil est chez elle. Pas parce qu'elle est à l'hôpital. Mais parce que cette vague de froid, ce noir envahissant, cette pénombre, c'est son royaume. L'étrange fait son apparition soudaine, et Sybil est chez elle. Chaque royaume a sa princesse. Quelque chose arrive, Sybil le sait, mais le Dr Blackwood doit faire bonne figure.

La sauvage de tout à l'heure est à côté, c'est pour ça qu'elle ne l'avait pas vue. Maintenant elle la voit distinctement dans le noir.
Ses poils se hérissent quand elle sent la main de la patiente numéro 1 se poser sur elle. Mme Murdoch. Un rictus tend ses lèvres, un rictus dont on ne peut déterminer par où les commissures penchent, vers le haut ou le bas ? Elle regarde du bout des yeux la main sur son épaule, figée. Puis elle se décale, comme si une bestiole s'était posée sur elle. Son sens médical ne la trompe pas, la jeune femme doit bien avoir une commotion cérébrale, elle semble amoindrie. Mais ladite patiente aussi dangereuse et désagréable soit-elle a aussi un sens pragmatique, Sybil doit bien le lui reconnaître. Quel dommage pourtant de s'adresser à la personne la moins capable de rassurer les autres. Si Sybil s'exprimait, il y aurait fort à parier que la panique de la salle ne ferait que s'amplifier.

D'ailleurs, elle n'a pas aimer la façon qu'elle a eu de lui parler. Les leçons, Sybil les aime dans les livres, pas faites par des patientes à demi conscientes, tueuses d'Unseelie, alcooliques chroniques au manque d'hygiène de vie flagrant. Sa remarque l'horripile. Même si elle est juste.

« La gastro-entérité n'est pas  ... »
Une urgence vitale, c'est surtout désagréable pour ceux qui la vivent. Comme la peur.

Elle se retient... car Sybil n'est pas imbécile, et elle sait se contrôler. Sa langue affûtée ne mérite pas de la mettre en danger. Elle n'a pas assez d'instinct de survie pour déterminer si la jeune femme ici présente est en capacité de la tuer, donc il vaut mieux rester silencieuse. Sybil pense que la dame Murdoch n'a pas d'intention meurtrière mais qui sait ? Les gens ont parfois de drôles d'idées.
Elle serre les dents et continue

« Je vais aller jeter un œil. »

Sybil, glissant dans les ténèbres, s'approche comme un prédateur de ce patient mal en point. Les odeurs l'assaillent, on entendrait presque un sifflement sortir de sa bouche tandis que son nez se fronce. Une vague de froid encore plus froide suit sa traînée. Elle n'a touché personne, slalomant entre les humains avec une facilité étonnante, derrière elle, un silence se fait. Elle entend des murmures. Comme si c'était elle qui était désormais en charge de ce radeau de la méduse, radeau de la peur. Elle ne veut pas de leur peur, car elle ne la ressent pas.
Son doigt, sans gant passe sur la peau frissonnante, secouée de convulsions du bonhomme. L'haleine alcoolisée, d'un mauvais alcool, des amis de la victime se répand dans l'air. L'un essaie même d'attraper Sybil qui se retourne brusquement vers lui, un peu trop vite pour que ça n'ait pas l'air terrifiant. Un murmure sec à son intention :

« Ne me touchez pas. Et taisez-vous par pitié. »

Finie la politesse. Il se recule, instinctivement. C'est mieux. Sybil aime le contact de son ongle sur la peau si fine de cet homme. Elle le touche lentement. Son cri l'incommode et elle s'en délecte à la fois. Sombre contradiction. Dans son laboratoire, un scalpel pourrait trancher cet épiderme et elle connaîtrait le mal dont souffre cet homme. Mais cela voudrait dire qu'il serait mort. La mort ou la vérité, qu'est-ce qui prime ? Pour l'instant, il faudrait le sauver, mais de quoi ? Telle est l'énigme que doit résoudre le docteur. Confusément Sybil sent bien qu'il réagit à quelque chose d'extérieur, qu'elle sent. Plusieurs causes possibles de convulsions se déroulent en une liste dans son esprit. Sans électricité, cela risque d'être difficile de trouver la source du mal. Son stéthoscope passe sur le torse, le cœur ne bat plus régulièrement mais les convulsions font penser à une origine neurologique.
On pourrait penser Sybil frêle et précieuse. Ce qu'elle est. Parfois. Machinalement, sans s'arrêter de réfléchir, elle attrape fermement la tête de l'homme, ouvre sa bouche d'autorité. Rien sur les voies respiratoires. De cette même violence maîtrisée, elle décale le corps pourtant bien consistant, seule, sur le brancard, pour le mettre en PLS.
Pour rassurer les autres patients, elle pourrait leur dire que c'est une crise d'épilepsie. Cependant Sybil n'est ni du genre à parler à la foule, ni à mentir. Cet homme est sur le point de mourir et Sybil ne sait pas de quoi.

« Monsieur va être emmené en salle d'examen, poussez vous s'il vous plaît. Doug, pensez-vous pouvoir le déplacer au bloc 2, qu'il soit plus au calme en attendant le retour du courant ? »

Sans courant et sans un autre médecin, une réelle opération semble compliquée. Il vaut mieux éviter qu'il ne continue de répandre la panique et lui-même sera mieux plus au calme. De sa poche, elle sort une seringue, et évidemment, une dose de morphine. Puisqu'il hurle à la mort, c'est qu'il doit souffrir. Sybil ne peut pour l'instant pas le guérir mais elle peut le soulager de cette souffrance. Il sera dans un monde plus ouaté et cela lui permettra de garder son énergie. Le brancard est en mouvement quand elle lui administre du premier coup, son index sur la veine, sa dose de morphine.

La voix de la sauvageonne tactile sonne dans son dos. Sybil peut lui reconnaître qu'elle a une voix qui porte et un certain type de courage, mais à part déclarer des évidences elle n'aide pas vraiment. D'ailleurs son sourcil se lève.
Et vous êtes électricienne peut-être ?
Sybil est venimeuse, le rejet de la dame Murdoch est à la hauteur de son exaspération et sans doute d'une peur interne. Le comble est que cette femme est la personne qui ressemble le plus à quelqu'un de raisonné dans ce chaos. Sybil est gênée par ce contretemps, et cette irruption de l'étrange. Elle aimerait connaître la source de ce qu'il se passe dans cet hôpital mais elle n'en a pas le loisir, elle doit continuer d'exercer. Personne n'a l'air d'être en état de faire quoi que ce soit d'utile.

« Oui, rétablir l'électricité au complet. Le téléphone fonctionne Valentine ?   »

Sans attendre la réponse, Sybil s'oriente vers le bureau d'accueil, elle tire le combiné qui bipe. Elle ne s'adresse pas à la cantonade mais bien à Valentine qui ne se trouve pas trop loin, et à cette Murdoch qui doit l'entendre de là où elle est. Loin de la peau de Sybil, au cas où il lui reprendrait de la toucher...

« Coupé. Peut-être qu'on peut remettre le courant via le panneau d'arrivée électrique ? Ou rallumer le générateur. Valentine, vous avez un plan du site ? »

Sybil n'y connaît rien en circuit électrique. Si cela ne tenait qu'à elle, elle exercerait la médecine dans la pénombre, avec ses remèdes de plante chez elle et ses outils de couture comme elle les appelle. En attendant il faut rétablir un semblant de normalité pour continuer à traiter ces patients de la manière conventionnelle. Un peu de pragmatisme. Et ce n'est ni une troupe de clochards ivres, ni une femme enceinte, ou une femme commotionnée, une bande de peureux en blouse blanche ou un vieux jardinier dont le doigt pend mais bien des gens valides qui devraient s'en charger. Mais elle n'a pas le choix.

Vitold Chokowski
Vitold Chokowski
Le choix rapide est encore le plus logique dans une telle situation et même Crapaud, dans ses retranchements, ne peut que céder au professionnalisme calme de la jeune femme. Sans parole, il hoche la tête, lui concède l’accès à sa main et à l’aspect déplorable de son doigt à demi sacrifié. Vitold devient immédiatement plus distant. Bras croisés, visage de glace, il ne commente pas et ne tend pas à freiner l’action de la docteur – la nuit s’en charge. Chape d’obscurité qui le plonge dans l’ombre comme si le sol s’ouvrait soudainement sous ses pieds. Il fronce les sourcils, guette la lueur vacillarde des lumières de secours – ce n’est pas le cas.

Il n’y a que l’absence. Et les ombres autour de lui semblent presque caresser avec insolence la peau de sa nuque. « Crapaud ? » « Oué » Le vieillard a la voix un peu blanche. Il n’est pas impressionnable pour deux sous, le vieux, mais Sebastien sait parfaitement ce qui peut se cacher dans la nuit. On lui a déjà pris deux employeurs et son œil borgne essaye de situer la silhouette du troisième sans succès.

Déjà la docteure s’éloigne, motivée à trouver une solution. Et Vitold entend le froissement du drap en papier sous le mouvement de son aide. « Ne bouge pas Crapaud. » « Ey gne peuh » « Une lampe ? » La manche baveuse de sang plonge dans la poche de Sebastien, en tire une étrange fumerolle épaisse de caoutchouc et de grosses piles.

« Cela pourrait être utile effectivement. » Commente Vitold en saisissant la tige dont la lumière blafard jette une œillade en noir et blanc sur les alentours. « Reste sur le lit, la couture tiendra. Je vais aider. » « hun ! » « Je serai prudent. Ne t’en fais pas. » « Ou hung rrnik » « On verra bien. »

Crapaud a pourtant bien raison de craindre le mouvement de panique, seulement Vitold n’entend pas ajouter à son stress avec ce genre de commentaire. Il quitte la petite chambre, rejoint le couloir où s’entrepose les victimes du soir – se fait happer par une femme qui accompagnait son gamin à la cheville fracassée – maudit skate-board. « C’est la maintenance ??! C’est la maintenance ???! » « Non madame, lâchez mon bras. » La voix grave et reconnaissable du croque-mort la fait aussitôt bondir en arrière.

« Docteure, tenez. » Au moins, sous l’éclaircie, la chevelure blonde de Sybil est reconnaissable, même si un homme, voulant quitter la salle d’attente, le repousse brutalement contre Enid. Contre la jeune silhouette brune, il est un choc osseux et grimaçant. Bon sang. « Excusez moi, j’espère ne pas vous avoir fait mal. »
Le Phare
Porteur de lueur
Le Phare

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03.1994
tw : blessures
Ainsi brusquement aux prises avec les ténèbres, St. Madeline fait pâle figure. Réputation des lieux mis à mal, médecins coupés dans leur élan et patients mécontents. Décidément, Sinclair avait mieux à faire que d’investir dans cette ruine qu’on ose encore appeler lieu de soin. Bien souvent, les civils préfèrent conduire jusqu’à la grande ville, lorsque cela est possible.

Il fait noir oui. Tant pis pour les urgences.

D’une part, ça s’affaire du côté de l’ivrogne, de l’autre, ça s’agite à la recherche de la lueur salvatrice. N’y a-t-il pas un technicien dans le coin ? Quelqu’un pour réparer ce merdier ? Parti peut-être. Viré, si ça se trouve, depuis quelques mois ? Doug ne se perd pas en considération, lève le nez vers ce qu’il croit percevoir de la docteur. La glaciale à la mine d’enfarinée. Pas méchante. Juste étrange. « Je fais au mieux doc. »

S’il a bien senti l’animosité tacite entre la Blackwood et la patiente, il n’en dit mot. Pas ses affaires. Doug est du genre à ne pas s’en mêler. Entre le réel manque d’intérêt et l’envie de garder son poste, sans doute. Elle est bien mignonne, à affirmer qu’il faut rallumer la lumière. La belle jambe. Il abandonne cela dit Valentine aux prises avec l’accueil et son tumulte.

La jeune femme ainsi prise à partie baisse les yeux sur la grande gueule. La femme forte à la gueule braillarde. Ah ça… Valentine admire un peu de sa verve dont elle manque cruellement. « Vous devriez rester dans le fauteuil madame, vous allez vous faire mal. »

Ne manquerait plus qu’elle s’effondre elle aussi et ils seraient dans de beaux draps. Pour autant, elle revient près du bureau, se tenant à une petite distance de sécurité de Blackwood. Grande dame de marbre froid qui l’a toujours mise un rien mal à l’aise. « Non. Je ne m’occupe pas de la sécurité désolée, seulement de l’accueil. »

Elle se décale cependant jusqu’au plan de secours de l’établissement. Les sorties de secours y sont annotées, mais pas moyen de quitter les lieux sans les patients. Téléphone coupé. Elle cherche le local électrique du regard. « C’est vers les sous-sols, près de la laverie. Je n’ai pas les clefs, mais il faudrait s’y rendre. C’est étrange qu’un technicien n’ait pas déjà essayé quelque chose. »

Comme s’il avait été happé par les ombres. Comme elle dans un instant, peut-être, s’ils ne font rien. Comme l’a prédit Sébastien Crapaud qui a vu bien des choses se masser dans la pénombre. Tous à leur façon savent de quoi ils parlent.

Une femme s’égosille et Valentine s’empresse de la saisir à l’épaule. « Tout va bien, madame, la maintenance devrait vite agir. » Un regard penaud au blafard qui se dévoile à l’autre bout d’une lampe de poche. Elle voudrait la saisir, mais l’objet est aussitôt confié à la médecin. Se protégeant derrière son accueil, Valentine fouille dans un tiroir pour en dévoiler un trousseau de clefs. « Celle du local électrique devrait être dessus. Mais je pense que nous devrions attendre. Je ne sais pas bricoler tout ça et vous ? »

Question rhétorique. Tout cela la rend amère. Elle songe qu’elle pourrait aussi bien sortir. Quel intérêt de garder ainsi enfermée la secrétaire avec le reste finalement ? Mais ce qui évolue dans le noir la retient. Quelque chose lui souffle de ne pas trop s’éloigner. Au moins de la femme bruyante.

Mais les lieux ne sont-ils pas trop calmes ? Comme si les autres médecins, comme si toute la population de l’hôpital s’était tue. Comme s’il n’existait plus rien, en dehors de l’accueil et des âmes qui le peuplent encore.

Et au loin, dans le couloir, un sanglot plus puissant se fait entendre. Et Valentine, en alerte, biche dans les phares d’une voiture, approche presque instinctivement.



Hors RP




Voilà la suite de votre situation. Vous êtes libres de poster comme bon vous semble et autant de fois que vous le souhaitez jusqu'au 2 Février où la suite vous sera envoyée.

Vous pouvez également interagir et faire interagir les PNJ présents à votre guise.

Comme toujours, nous sommes disponibles par mp pour vous aiguiller au besoin et quelle que soit la question. À bientôt !
Enid Murdoch
Enid Murdoch

Panique à St. Madeline

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03.1994
tw : blessures, vulgarité, description graphique
Électricienne, Need ne l’est pas. Pas plus qu’alcoolique. Abstinente par devoir et aussi parce que toute cette foutue bourgade l’a pas attendue pour se beurrer la gueule comme une galette de Pont-Aven, tous les jours que Dieu fait, provoquant ainsi, pour la pauvre Barmaid, des gueules de bois en série sans avoir à ingérer la moindre dose éthanol.

Merdique comme petit pouvoir secret, n’est-ce pas ?

Ceci étant dit, la femme est loin d’être le couteau le moins aiguisé du tiroir. Faudrait pas que la petite bêcheuse l’oublie. Tout le monde n’avait pas pu naître avec l’argenterie plein le bec. Tout le monde n’était pas un pinson – ou pour ce cas précis, un vautour.

Un vautour particulièrement misanthrope si l’on en croyait le bon de côté que la Blackwood avait effectué. Elle a reniflé discrètement ses fringues, Need. Parce qu’elle sait ce que disent les rupins, les connards friqués qui ont eu la chance de péter dans la soie depuis leur premier souffle : la pauvreté pue. Sauf qu’Enid, elle exhale la forêt : le pin, la menthe et le sang. Pas l’odeur poisseuse d’humidité et de crasse que laisse sur le vêtement les corps mal lavés.

De la pulpe de ses doigts cerclés d’argent massif, elle inspecte la main criminelle – les callosités provoquées par le maniement des armes, les écorchures des phalanges malmenées, l’étrange délicatesse de la peau pâle. Rien n’explique donc cette réaction qui la gêne aux encoignures. D’ordinaire, elle en aurait rien à carrer – c’est pas comme si l’avis des gens l’empêchait de pioncer. C’est peut-être qu’elle aurait voulu…

Lui plaire.

Ca la contrarie, cette constatation. Parce qu’elle la trouve franchement désagréable et qu’en tant qu’adulte vaccinée, elle a appris à gérer ce genre de pulsion, notamment quand elle est bouclée dans un synopsis de film d’horreur et qu’la situation a pas l’air de s’arranger. C’est importun, pas recherché, un peu artificiel. Et sous ce fatras, demeure l’acidité de la peur. C’est comme un reflux qui remonte de l’estomac. Une traînée brûlante d’effroi et de haine qui lui gâte la langue. Ca l’aide à repousser l’attraction étrange qui s’exerce sur elle.

Y a quelque chose qui pue. Et c’est pas Enid. Mais y’a d’autres chats à fouetter et faut se foutre un coup de pied au derche. C’est ce qu’elle fait comprendre à la secrétaire d'une œillade vénéneuse.

« Je poserai mon cul dans ce fauteuil quand je pourrais être soignée. En attendant, au vu de… »

Interrompue par le choc d’un corps osseux contre le sien, Need sent sa patience fondre comme un bonhomme de neige qu’on aurait passé au lance-flamme. Elle s’empêche de saisir le cran d’arrêt qui dort dans sa poche arrière et s’apaise docilement face à la courtoisie de l’homme qu’elle ne distingue que très partiellement.

«  Pas de mal. Vous faites pas de bile. »  

Elle marmonne tranquillement en observant avec fascination le rai de lumière qui transperce l’obscurité. Des particules de poussière – comme de la neige sur un écran – y flottent paresseusement. Enid, elle aime pas le calme. Ca a toujours la saveur de la tempête en creux.

Et ce qui rôde dans les couloirs, c’est pas humain. C’est vorace. Ca se goinfre de détresse et des humeurs noires qui suintent de la populace bloquée. Y’en a toujours pour dire qu’elle est parano, Need mais faut pas lui en raconter. Elle a vu l’abysse et l’abysse l’a regardée. Depuis, elle sait. Dieu n’est qu’un gamin oublieux qui joue avec une fourmilière pendant que le Diable sévit ici-bas. Alors, elle pointe le couloir de son index.

« Je suis pas électricienne mais je tiens à bout de bras un pub bicentenaire. Ca doit pas être bien différent et chuis peut-être votre seule chance de retrouver la lumière, vu que personne ne se décide à se bouger le cul. C'est que ça se bouscule pas au portillon lorsqu'il faut mouiller sa chemise et on s’ra pas de trop pour relancer la machine. Alors, si ça vous va Doc, vous allez nous servir de guide dans le Dédale. Y’a pas à dire, l’architecte de votre hôpital d’vait pas tourner qu’à la tisane. Quant à vous, là, le grand gaillard, vous pourrez couvrir nos arrières parce que je suis pas persuadée qu’il nous arrive rien là où on va. »

Au loin, le gémissement reprend alors que toutes les têtes se tournent vers le couloir qui transpire d’encre.

« En route. »


Sybil Blackwood
Sybil Blackwood

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03.1994
tw : mort, blessures


« Merci. »

Pour quoi ? Il aurait sans doute été préférable qu'il la garde. C'est une experte du corps humain mais pas une technicienne ou une meneuse d'hommes.

Lampe torche collée dans la main, cheffe proclamée d'une expédition nocturne dans les couloirs de l'hôpital, l'inconfort est maximal pour la Doc. A cela il faut encore ajouter d'un côté la peur de se dévoiler auprès de la patiente chasseuse d'Unseelie, le besoin de contrôle de son apparence, l'inquiétude pesante des patients, le sentiment vivace qu'une autre créature doit traîner dans les parages et heureusement la voix d'outre tombe rassurante de M.Chokowski.

Sybil aurait bien suivi le conseil de Valentine mais visiblement il en sera autrement. Elle n'a pas assez de caractère pour s'opposer frontalement à ses accompagnants. Elle est autant attirée que répulsée par la pénombre bien vivante qu'ils 'apprêtent à aller chercher.
Elle aurait adoré, si elle était seule, se retrouver dans les couloirs de l'hôpital la nuit, avec ce petit vent d'horreur qui souffle sur les chevilles, cet air glacial qui serpente sur la peau. C'est son domaine. Mais armée d'une lampe torche et de deux vaillants, intrépides compagnons... cet escapade nocturne prend l'air d'une épopée héroïque, l'anti-Sybil par excellence.

Sauf que l'oiseau déplumé à la commotion cérébrale semble avoir de la jugeote, sans doute trop, et un caractère bien trempé. Sybil n'est pas d'accord avec tout mais une curiosité la dévore de l'intérieur. Elle veut aller voir qui ou quoi est la cause de cette noirceur. C'est sans doute pour cela que la grande blonde attrape les clefs tendue par Valentine.

« Nous pouvons toujours y jeter un oeil, nous ne serons pas long Valentine. »

Elle aurait aimé ne pas être la première, car elle aimerait prendre la poudre d'escampette si besoin.
Tant pis, on souffle et on avance.

Les pas de Sybil ne font aucun bruit, elle avance élégamment, trop elle n'a pas du tout l'air vigilante comme quelqu'un qui tient une lampe dans le noir alors qu'une menace semble rôder. En glissant presque. Elle avance assez rapidement dans le couloir menant à l'escalier. Sa voix, douce et basse murmure et siffle à la fois, comme une voix langoureuse et hypnotique. Sybil pointe de la lampe les battants de la porte.

« Ce sont les escaliers. La salle de maintenance est au premier étage. »

Sybil s'arrête une seconde et se tourne vers Murdoch. Son visage est dans la pénombre, elle ne tourne pas la lampe vers elle.

« Vous pensez qu'il y a quelque chose qui nous attend là-bas n'est-ce pas ? »



Vitold Chokowski
Vitold Chokowski
Grand gaillard. Voilà bien un terme que Vitol ne pensait pas entendre un jour le concernant mais la vindicte de la jeune femme qu’il vient de bousculer arrache un rictus amusé à son visage d’aigle. Il est vrai qu’elle accroche l’oreille avec ses raccourcis linguistiques qui lui rappellent un peu les crachats de Crapaud dans une moindre mesure. Mais elle n’est pas insensée et son aide est la bienvenue – aussi n’hésite-t-il pas à les suivre, elle, la brune nerveuse qui décoche ses mots comme les balles d’un automatique, l’autre, qui ressemble à une liane, intellectuelle et droite comme la tige d’un roseau, discrète comme une plume qui voltige.

Derrière elles, Vitold est une ombre faussement menaçante qui ne les côtoie qu’à un bref pas d’écart. Loin des cris et des plaintes, le silence s’abat autant que la nuit profonde et lui retrouve un calme qu’il ne pensait pas avoir échappé. Il est dans son domaine, dans le mystère et les ténèbres et cille pensivement vers la blonde Sybil qui évoque enfin le cauchemar.

« Nous sommes dans un hôpital, ce n’est qu’une banale panne de courant. Nous trouverons peut-être l’un de vos techniciens agacé de la panne. Mais certainement pas de monstre. » Sa voix grave se veut rationnelle car Vitold connait la puissance du doute. C’est un chant de sirène pour toutes les lignes de chaos qui filent à travers la lande et les alentours de Malfearn.

Le monstre est un fin limier qui sent la peur et s’y faufile comme la sangsue sait se glisser près de l’épiderme du nageur inconscient, attirée par ses remous et par les vibrations de son cœur bien plus que par la vision de sa candeur. Et calmement, Vitold s'avance pour gravir les premières marches, la main posée sur la rambarde, le visage tendu vers le premier étage.
Le Phare
Porteur de lueur
Le Phare

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03.1994
tw : blessures
Pas de monstre, rien qu’une panne. Un triste hasard, bien sûr. Mieux vaut s’en rassurer. Mieux vaut s’en persuader. Rien de plus excusable alors, de laisser parler ses instincts, ses besoins, ses pulsions. La peur et la lâcheté dans le cas de Valentine, sourde au petit manège qui s’opère autour d’elle, guide contrainte et forcée de la troupe en devenir.

Les mots de la femme précédemment en fauteuil la glacent. Elle en craint l’autorité, s’y soumet comme une bête aux ordres de son maître effrayé. Très bien. Pas de fauteuil. Elle acquiesce même pour faire bonne mesure, ne trouve qu’un faible réconfort dans la voix grave de l’homme qu’elle distingue à peine et qui, à son sens, est plus mesuré que tout ce petit monde.

Le gémissement du malade continue, perce comme un écho des tréfonds de la terre. Ainsi, l’hôpital prend des airs de caverne inexplorée. Valentine ne s’était jamais imaginée archéologue. Elle serre les rangs, ferme la marche. S’accroche à la voix de l’homme et à la lumière qui scinde les ténèbres étouffantes.

C’est un instinct primaire qui la tenaille. Celui des premiers hommes abandonnés aux forêts les plus sombres une fois la nuit tombée. Le danger lui semble venir de partout à la fois. Elle aimerait la verve de la femme brune. Le calme absolu de la médecin. Qui plus est, la tension torve entre les deux femmes parvient à agrandir son malaise. Ne manquait plus que cela.

« Quelque chose ? » En bas ? La voix de Valentine joue au trémolo. Quelque chose comme un accident ? Quelque chose comme l’air froid qui n’en finit plus de l’envahir. Et ce putain de cri qu’elle croit être la seule à entendre encore, malgré l’écart mis entre eux et l’ivrogne perclus de douleur. La secrétaire s’arrache d’un rire sordide à mesure qu’ils s’enfoncent dans les entrailles du bâtiment. « Pourquoi agissez-vous tous comme si nous allions tomber sur un tueur en série… Ou un vampire, un monstre ? »

Car même pour elle, l’évidence crève les yeux. Tout ici transpire l’étrange. Même pour Malfearn. Et si elle ne se détache pas du groupe, c’est par souci de sécurité. Pour mieux faire taire son ventre qui se noue à lui faire mal.

Alors qu’ils approchent des sous-sols, la femme se fige complètement, les yeux braqués sur le couloir à peine éclairé de la lampe. « Jules ? »

Elle coasse, les yeux exorbités, la bouche largement ouverte. Sous le vaisseau lumineux, si le groupe est attentif, une petite ombre se fait entrevoir. Et file tout aussi vite, cavalant plus loin encore. Pour Valentine, c’est le signal d’alarme et la voilà qui prend la tête de la marche, les dépasse et file elle aussi, à la poursuite de son petit. « Jules ! Jules mon cœur ce n’est pas un endroit pour jouer, c’est dangereux ! »

Son pas s’éloigne. Le tapement régulier de ses chaussures sur le carrelage, puis le vide. Rien que le néant.
Un sursaut dans le silence.

Puis un grondement. Guttural, caverneux.

Derrière eux, à l’angle du couloir menant au sous-sol, ce qui semble être un patient à en juger par sa tenue se tient, droit, l’air tout aussi halluciné que Valentine. Les dévisagent. Gueule ouverte, salive au bord des lèvres. Filet liquide entre les jambes. Valentine a abandonné les clefs du local derrière l’apparition.
L’air glacial, lui, ne cesse d’empirer.




Hors RP




Voilà la suite de votre situation. Vous êtes libres de poster comme bon vous semble et autant de fois que vous le souhaitez jusqu'au 23 Février où la suite vous sera envoyée.

Comme toujours, nous sommes disponibles par mp pour vous aiguiller au besoin et quelle que soit la question. À bientôt !
Enid Murdoch
Enid Murdoch

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03.1994
tw : blessures, vulgarité, description graphique
« Heureux les simples d’esprit, car le royaume des Cieux leur est ouvert. Matthieu 5 : 3. ».
Need tergiverse souvent à propos du Livre. C'est sûr que ça fait un bout qu’elle n’a pas usé ses fonds de culotte sur les bancs cirés d’une église et écorché ses genoux sur un prie-Dieu. Mais, elle possède l’intime conviction que la Bible, c’est pas la transcription approximative de la parole d’un pauvre vieux à barbe perché sur un nuage duveteux qui aurait trop picolé de martini.

C'est la trace d'un savoir perdu. Antédiluvien.

Sacrément alambiqué, inutilement moraliste et bourré de considérations assez limites si vous vouliez son avis, mais bon, il y en avait toujours pour se prendre pour des prophètes.

Aussi, pour ce qu’elle en sait, ainsi perdue dans les ombres, le Royaume des Cieux, c’est juste une manière polie d’évoquer la Grande Camarde. Pour une fois que la traduction n’était pas difficile, la hurleuse ne va pas s’en plaindre. Par la suite, elle se convainc de prendre une saine résolution. Celle de fermer sa mouille et garder ses réflexions pour elle-même parce que si la secrétaire  commence à péter une durite, leur petite équipée risquait bien de les envoyer toquer aux portes de Saint-Pierre avant la fin de la nuit.

Et Need, elle a pas envie de faire de tourisme surtout s’il existe un risque que l’Enfer soit. Elle écoute ce que le labyrinthe dans lequel ils s’enfoncent lui souffle à l’oreille. N’a-t-elle pas conscience qu’elle est y séjourne déjà ? Ne voit-elle pas que toute son existence merdique est de la matière dont sont faits les cauchemars ?

Quelle pauvre fille stupide, elle fait, n'est-ce pas ?


Les particules en suspension, poussière ou cendres mortuaires, jeu d’ombres et de terreur.
L’odeur de javel où surnagent celles de pisse, de gangrène et de sang caillé.
La moiteur d’une paume sur le manche de la lame d’argent.
La saveur doucereuse de la pourriture qui galope derrière la fadeur maladive des murs.
L’écho inquiétant d’un gémissement qui se répercute dans le corridor carrelé.

Un magistral concerto en folie majeure.

Ca la frappe comme une vague scélérate. La panique qui la submerge n’est pas la sienne mais ça la saisit à la gorge avec l’intention ferme de ne plus la lâcher. Need ne voit pas la silhouette enfantine galoper dans les ténèbres, n’entend pas les pas de Valentine briser le silence funeste des lieux pour s’égarer aux carrefours fatals de son sinistre destin.

Elle n’est plus qu’une absence.

Pour Need, il n’existe, alors, plus que les crocs de l’instinct qui claquent derrière ses mollets, la poussant à prendre en chasse la mère éplorée. Conservant un équilibre précaire, elle s’engouffre dans l’une des coursives de service, entraînant à sa suite le reste du groupe, les enjoignant à lui coller le train. Ce qui grogne par-delà les galeries n’appartient plus au genre humain.

« Perdre sa trace, c’est l’abandonner au royaume de la nuit.». Sa prédiction claque comme une balle contre la peinture qui s’écaille.

Haletante, la vision rendue floue par la commotion, Need manque de percuter quelque chose ou plutôt quelqu’un. Dans le halo glauque et tremblotant de la lampe se tient un vieux.  Une trogne à la Freaks où il aurait pas dénoté. Celui-là est déjà foutu. La corruption aura eu raison de lui.

« Vous pensez que sa tête peut tourner à 360 degrés ? » Elle tente de détendre l’atmosphère, Need, parce que l’être vient littéralement de se pisser dessus et qu’il bloque le passage. En un autre temps, un autre lieu, elle l’aurait purement et simplement envoyé ramasser ses dents pour dégager le passage mais vous voyez, elle est en bonne compagnie.

« Monsieur. », elle tente, sa main vient lui toucher son épaule. Need doit savoir ce qu’il est.  A travers le tissu, la peau est glacée et dure comme un sépulcre.

Elle ne ressent rien. Et ce néant, ce gouffre noir se répand en elle comme un poison. Il n’existe soudainement que le vide. Abyssal.

Puis la douleur. Vive. Salutaire.

Elle est soulagée parce que ça la reconnecte avec elle-même. Puis Need sent sa langue noire qui glisse sur sa peau comme un vers glaireux.

Le sang coule.

Le Vioque lape la plaie. Comme un clébard galeux.  

Son couteau est dans son autre poche.

Merde

Sybil Blackwood
Sybil Blackwood

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03.1994
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Pardonnez nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensé. - Matthieu 6:12-15

Cette fille va tous les tuer. Valentine avait eu la décence de se diriger seule vers sa mort mais la Murdoch elle va tous les tuer en courant à sa suite. L’hôpital ne ressemble même plus à ce qu’il est vraiment. Ils sont désormais dans le monde d’une autre créature. Un monde à la fois familier de Sybil et qui la répulse.

*

La panique de Valentine, elle s’en était bien accommodée. Elle l’avait presque savouré, ce délicieux goût de peur, cette nervosité qui ne se cache plus. Quand la secrétaire s’était élancée vers l’ombre, Sybil avait instantanément décidé de l’abandonner à son sort. Par survie, par indifférence, par lâcheté. Et parce qu’elle ressentait autre chose.
Un sentiment de territorialité l’avait envahie. Une autre créature était par ici, ou autre chose encore. Mais elle aussi était là. Et c’était à elle. À l’intérieur d’elle, une pulsion sauvage grattait son cœur pour sortir. Sa posture droite avait changé, les poils de sa peau avaient disparu, ses ongles étaient devenus blancs, ses pupilles s’étaient réduites comme peau de chagrin. Quelques petites bêtes arachnéennes semblaient se déplacer sur les murs du couloir. Ça n’aimerait pas l’intrusion de la dame blanche, le docteur Blackwood. Mais Sybil n’aimait pas non plus sa présence.
Puis Enid Murdoch, chien fou et suicidaire avait suivi Valentine. Et Sybil avait suivi le chien fou.

*
Les humains et leur satané besoin de sauver tout le monde. Les hurleurs et leur idée qu’ils sont les protecteurs de l’humanité, leur besoin d’aller combattre ce qui ne nécessite pas d’être combattu. Elle est déjà épuisée des quelques pas de course. Le royaume de la nuit, qu’est-ce que c’est que cette histoire de hurleurs pour faire peur aux bébés hurleurs. Si l’agressivité prégnante de se retrouver face à un de ses semblables n’avait pas été aussi forte elle aurait sans doute été au moins aussi furieuse contre les hurleurs. Sa mère a raison. Pourtant la voix de Jo résonnt dans son  esprit. Ils ne sont pas tous pareils.

Elle siffle entre ses dents.
« Nous y sommes déjà. Murdoch arrêtez... »

Elle n’a pas le temps de finir sa phrase que l’autre lui a coupé la parole pour faire une blague et foncer dans … un vieux patient pas dans son état normal. Sybil s’arrête avant. Parce qu’elle, elle voit dans le noir. Qu’elle a la lampe. Et qu’elle n’a pas de commotion. Et peut-être aussi parce qu’elle l’a senti de tout son être avant de le voir. Les créatures comme Sybil ne vivent pas en meute, pour une bonne raison.


« Te voilà. » murmure-t-elle.

Sybil Blackwood agrippe son bistouri de sa blouse, celui qu’elle vient d’utiliser pour l’ami à gueule cassée de leur troisième compère. Un bistouri sale, avec du sang, qu’elle avait mit par réflexe dans sa poche, avec un manche en plastique pas très solide. Sybil n’a pas la même liberté que la créature en face d’elle. Elle aimerait garder sa véritable nature secrète. Surtout pour la Murdoch, qui profiterait de survivre pour venir l’assassiner dans son sommeil.

Elle tend sa lampe à M.Chokowski puisqu’elle ne le connaît que comme ça. Il a l’air de confiance et l’objet est devenu un fardeau pour elle. Dans la lumière blafarde de la lampe, le visage gueule ouverte de ce patient qui n’en est plus un, la clef de Valentine au sol derrière elle et entrant dans la lumière, la patiente qui en est toujours une, qui touche la créature…

« Non ! »

Sybil Blackwood tend sa main inutilement. Elle sait ce que la créature va faire à Murdoch, elle aurait fait pareil. La lampe qui la gêne tombe sur le sol. Elle marche toujours vu la lumière qui s’en dégage encoremais moins bien, et des éclats de verre ont glissé sur le sol. La créature en a profité pour attaquer. Sybil n’a pas d’attache envers sa patiente, elle serait bien partie, pourtant Joséphine lui en voudrait sans doute terriblement de ne pas bouger. Joséphine et Murdoch doivent se connaître, entre tueuses de vampires. La hurleuse et son courage se serait jetés au-devant du danger comme Murdoch. Elle n’est pas comme ça Sybil. Pourtant elle avance vers la créature, serpente vers sa proie. Vers elle son odeur de pisse et sa bouche grande ouverte, vers l’odeur de sang rouillé d’Enid. Ça ne va pas arranger sa commotion.
A moi. A moi. Son instinct la pousse à l’attaque. En elle un crissement s’intensifie.
Quel soulagement d’être dans le noir. Ils ne sont toujours pas à armes égales mais il faut profiter que les yeux des humains ne soient pas encore complètement habitués, que la Murdoch soit sonnée.
D’un pied, alors même qu’il semblerait que ses deux jambes sont un peu plus loin, elle pousse violemment Murdoch derrière elle. Elle glisse bien, ça doit être grâce à l’urine.
À moi. Mon hôpital. Mes humains.  Mon espace. Mon monde.
Son bistouri est passé comme une plume sur la gorge du patient, comme un cobra qui attaque d’un coup précis. Une prière murmurée s’échappe de ses lèvres au même moment « Pardonne nous nos offenses... » comme un dernier réflexe humain. Mais depuis Sybil reste plantée devant la créature. Ils se regardent. Et Sybil se tend, tiraillée entre son besoin de contrôle et son envie de lâcher prise. Devant la créature qui a pleinement épousé sa nature, puissante et malicieuse, sans doute plus vieille que Sybil. La mort. Derrière une chasseuse dont la vie entière tend à tuer ceux comme Sybil. La mort. Existe-t-il une autre voie ?

« M.Chokowski ? »

Sa voix tremble sous le coup des émotions qui la traversent. Elle la force à rester neutre, à ne pas siffler comme elle le fait quand elle se transforme. Sa blouse blanche est tâchée de sang, dans sa main ne reste que le manche en plastique du bistouri. Il faut partir avant que cette chose ne gâche sa couverture. Il faut partir car sinon elle attaquera de nouveau, ou Sybil le fera. Tant pis pour Valentine. Encore faudrait-il que Malfearn les laisse partir.

« Pensez-vous pouvoir récupérer les clefs ? Nous devrions partir. Et vous Murdoch, vous n’êtes pas en état de jouer les héroïnes. »

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03.1994
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On dit que certains lieux sont aussi vivants que ceux et celles qui les ont jadis construit. Le sol s'abreuve des offrandes qu'on lui laisse et les murs pulsent et suintent pour en redemander d'autres et d'autres encore.  Plongés dans le noir, les couloirs de l'hôpital s'étirent, rapetissent et se nouent, comme les vaisseaux sanguins d'un organisme prêt à tout avaler.

Ce soir, l'hôpital s'éveille. Sentez-vous son souffle vous aspirer? Il a faim.

Le métal des clefs résonne sur le carrelage, suivis des talons de Valentine. Une course effrénée vers une ombre qu'elle seule semble voir. Vers qui se dirige la pauvre secrétaire? Ou plutôt... vers quoi?

Murdoch tente de jouer les héros, malgré le corps qui demande grâce et la vision qui s'embrouille.  La chose qu'est devenue l'édifice n'aime pas ce genre de virus. Et elle envoie son premier anti-corps.

Il est maigre. Il est vieux. Ses os craquent et ses genoux ne le supportent plus depuis longtemps.  Ses proches non plus. Ce sont de belles promesses, toutes chuchotées tendrement dans sa tête qui l'ont fait lever de ce lit dont il n'est plus sorti depuis des années pour descendre dans ces allées désertes. Mû par une force externe, comme un sinistre pantin, les fluides s'échappent comme sa vie. Mais il avance, comme on lui murmure d'avancer jusqu'à Murdoch. Un autre fluide plus ferreux sort de la chair et il lape, comme une goule, au travers des berceuses qu'on lui chante, toujours dans sa tête.

La lame du bistouri est comme un choc. On cesse de chanter, dans son esprit pour mieux lui ordonner de rire.

Alors le vieux rit, en gargouillant son dernier souffle. Et il siffle, il siffle fort du plus fort qu'il le peut, comme on le lui a demandé. Comme un serpent en pointant d'un doigt noueux la poupée blonde. Il siffle en gargouillant, dans la buée d'un air de plus en plus glacé, en riant jusqu'à ce que la fontaine rouge à leurs pieds s'amenuisent.

Et le silence revient. Les clefs sont maintenant poisseuses. Il ne reste que le couloir noir devant eux et les pleurs lointains d'une Valentine visiblement ébranlée, un peu plus loin.

Les murs pulsent et suintent. Le corridor qui était à gauche était-il vraiment là, deux minutes avant?  Est-ce le pleur d'un enfant que l'on entend, tout au fond? Est-ce un froissement de tissu qui se trahit, tout devant? Ils ne sont pas seuls. Maintenant, les Icares du moment savent que le Minotaure les attendent.

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Voilà la suite de votre situation. Vous êtes libres de poster comme bon vous semble et autant de fois que vous le souhaitez jusqu'au 8 mars où la suite vous sera envoyée.

Comme toujours, nous sommes disponibles par mp pour vous aiguiller au besoin et quelle que soit la question. À bientôt !
Enid Murdoch
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03.1994
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Le vieux s’est brisé dans un rire.
Et le bref silence qui en a suivi est une putain de miséricorde.

Désormais, Need entend presque le doux glougloutement du mince ruisseau qui s’écoule langoureusement du cadavre vers elle. Pour ne rien arranger à ses affaires, ses vêtements déjà gorgées de fluides corporels collent à sa peau comme une maladie vénérienne au cul de Maupassant, et elle crève de froid. Sur l’épiderme troué de son avant-bras, on distingue entre la chair de poule, les lèvres déchiquetées que la morsure a laissées.

Elle jure entre ses dents alors qu’elle arrache le reste de sa manche souillée pour en faire un bandage de fortune.

Sa mutuelle allait encore gueuler. Son compte en banque aussi.
Mais ça voudrait dire qu’elle serait encore en vie à l’aube et ça en devenait une perspective presque réjouissante.

Si elle ne calanche pas d’une septicémie avant.
Si sa psyché ne vole pas en éclat.
Si elle ne finit pas dans la gueule du loup.
Si l’hôpital ne l’avale pas pour enfin recracher ses os.

Il faut bouger. Quand le chevreuil s’attarde, le chasseur l’attrape. Y’en a toujours pour dire que c’est de la faute du chevreuil. Alors, elle force ses muscles qui beuglent d’acide lactique et de fatigue, tangue comme ivre morte, avant de se rattraper au mur et de dégobiller ses tripes au pied du pragmatique Golgoth qui ferme la marche.

Sa commotion ne s’arrangeait pas.

« Navrée pour vos chaussures.»

D’un revers de main sale, elle essuie ses lèvres pâles, étalant une traînée de crasse sanguinolente sur son visage blafard.

« Voyez, ici ça ne fonctionne pas comme ailleurs. Votre technicien, vous le trouverez pas. S’il a existé, il est déjà parti depuis longtemps. Paix à son âme. Ce qui rôde dans ces couloirs est des plus singuliers. Ne faites confiance à personne. Surtout pas à vous-même. Ca pourrait vous faire prendre votre bite pour une roue de cheddar. Et je vous assure que vous avez pas envie d’y gouter. »

La hurleuse lui tapote l’épaule de compassion en rejoignant la doc qui semble s’être plongée dans la contemplation des ténèbres. Les mots lui restent bloqués dans la gorge, y’a comme un monolithe de remerciements qui veut pas s’expulser. C’est que quelque chose la gêne aux entournures. Need, elle a rien contre la reconnaissance. Après tout, même les bêtes en étaient capables alors pourquoi pas elle ? C’est juste qu’elle ne s’attendait pas à ça. Y’a quand même un pas pour un médecin entre découper des gens vivants pour les sauver et… le cadavre du vieux qui gît là, dans une flaque de sang, la gorge tranchée. Ca pose question, ce manque de réaction. Un humain normal serait bouleversé après avoir commis un acte pareil. Mais pas la Blackwood. Elle édicte ses ordres, en contrôle.

« Valentine n’est pas loin, Doc. Vous l’entendez comme moi. Vous avez pas prononcé le serment d’Hippocrate, pas vrai ? Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera…Ca vous dit quelque chose ? Et je vous le demande. Maintenant. Franchement, j’ai rien à redire pour le meurtre, parce que le vieux avait plus la lumière à tous les étages et qu’il fallait pas prolonger inutilement son agonie mais regardez autour de vous, les lieux ont déjà changé. Nous sommes piégés. »

Il y a des jours où Need aurait aimé être éduquée. Pas qu’elle était idiote, loin s’en fallait, elle s’était forgée une certaine culture à force de volonté, mais elle voit bien comment les gens la regardent, comment l’aridité de son vocabulaire, la crudité de sa syntaxe les empêchent de l’écouter.

« Putain, ça sert à quoi d’avoir dépensé autant de fric dans vos études si c’est pour avoir la moralité d’une petite cuillère ?»

Elle gronde son index vient de s'enfoncer dans le sternum de son interlocutrice dont la présence l’excède. Maintenant, elle sent. La révulsion épidermique, ça se diffuse à travers sa blouse et la soie de ses vêtements. Une haine qui lui fait monter la bave aux lippes et battre le sang dans ses tempes. Après tout, on l’a dressé à tuer, Need. A renifler les pistes et à sauter à la gorge de ses proies.

Et si…

Ca expliquerait tout.
Il ne lui faudrait pas grand-chose pour déterminer si la jeune femme est bien la créature qu’elle semble être. Un simple contact de sa main baguée d’argent sur la peau tendre et…
Mais Need n’est pas stupide. Elle est blessée et isolée. Face à la menace, il vaut mieux compter sur ses alliées, aussi étranges et dangereux soient-ils.

« Enfin chais pas à quoi je devrais m’attendre. Après tout, vous êtes tous pareils. Si Valentine est sur notre chemin, nous lui porterons secours, c'est non négociable. »



Sybil Blackwood
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Les ténèbres l’hypnotisent. Elle ne sait pas encore si c’est par plaisir, par frayeur ou encore par instinct de survie négatif. Les créatures ont-elles un instinct de survie ? Ce quelque chose qui les attend, qui gronde comme elle. Ce quelque chose qui est différent, attrayant et qui la répulse à la fois. Toutes les personnes raisonnables de sa vie, toutes les personnes humaines qui forment son entourage lui diraient sans doute de s’enfuir. Sa nature la pousse dans l’antre.
Cette répulsion est différente du frisson épidermique qui la secoue quand le doigt de la hurleuse se pose sur son sternum. Elle en aurait perdu le souffle d’humiliation. Les mots rageurs claquant sur son ego familial. Mais, la Docteur Blackwood la regarde de haut, avec tout le mépris qu’elle peut avoir, et ce mépris balaye tout. Y compris l’impression que la Murdoch veut bafouer sa fierté, une fierté bien élevée au Manoir Blackwood.

D’abord, elle avait eu pitié, il fallait voir ce cerveau abîmé, siège du corps chancelant, Sybil l’imaginait très bien à l’intérieur de sa boîte crânienne, ce cerveau abîmé qui forçait son corps à se traîner. Une commotion ce n’était pas rien. Ce corps suppliant, suintant de sang, d’urine, de bave, se traînait en chavirant comme un bateau ivre. Les réflexes médicaux qui restaient ancrés dans le Docteur Blackwood la faisaient établir un diagnostic relativement préoccupant. Il lui faudrait une chaise roulante, cela éviterait qu’elle s’agite dans tous les sens vu que son état empirait. Et ce bandage qui ne valait rien, il fallait désinfecter cette vilaine plaie.
Puis Sybil s’était désintéressée, entendant à peine le bruit de régurgitation. Elle avait été happée par ce qui les attendait, essayant de sentir la présence de l’Autre. Ou de Valentine accessoirement.

La hurleuse foldingue avait fini par se trouver un nouveau bouc émissaire. Quelle surprise. C’était Sybil.
La créature blonde n’avait bien évidemment rien écouté des conseils de la patiente. Cela tombait sous le sens. Après tout c’était sans doute la commotion qui parlait.
Sauf que maintenant, après l’avoir tirée de ses rêveries, la Murdoch l’invective. La tête de Sybil se penche, écoutant attentivement la hurleuse. Le serment d’Hippocrate ? Cela fait bien longtemps qu’elle n’en a pas entendu parler. Valentine ? Elle n’entend que l’autre créature qui vrombit. Sybil sourit, avec mépris, avec délectation aussi. Elle aime ce sentiment délicieux de chaos qui s’empare d’un esprit malade.

Enid Murdoch… je fais tant d’effort. Ne viens pas tout ruiner.

Enid joue avec les nerfs de la créature. Et ses propos sont incohérents, Sybil a du mal à en suivre le fil. Elle ne comprend pas si Enid lui demande de l’aide ou si elle la culpabilise de vouloir les protéger tous les trois en abandonnant la secrétaire.
Culotté pour une tueuse d’Unseelie qu’elle vient de sauver. On ne l’y reprendra pas deux fois. Elle siffle entre ses dents. Colère.

« Je viens de vous sauver la vie. »

Ecailles, doigts qui s’allongent… Puis inspiration. Mais le doigt se pose par-dessus sa blouse et un frisson l’envahit. Sybil Blackwood doit se contenir sinon elle se transformera. Sa main aux longs doigts se lève, s’apprêtant à la gifler par réflexe. Mais son regard traîne dans les yeux de la patiente. Elle est vulnérable. Tous les animaux acculés mordent. Elle se recule. Cet animal va bientôt lui sauter à la gorge. C’est étonnant mais cette perspective est presque réjouissante. Sa nature frétille de la perte de contrôle de la hurleuse.

« A quoi sert la moralité ici ? Vous savez où on est ? Non, moi non plus. Vous croyez que l’on sort d’ici avec des belles paroles ? Je vais mettre vos leçons de morale déplacées sur le compte de votre commotion. Qui d’ailleurs ne va pas en s’arrangeant vous ne direz pas le contraire. »

Inspiration. Il faut croiser les doigts que la hurleuse ne devienne pas folle et ne se mette pas à l’attaquer sinon ils seront tous mal en point. Sybil la première. La froideur de la peau de cette créature à sang froid qu’est Sybil a dû passer par-dessus les couches mais elle fait comme si de rien était. Le bout de ses doigts colle, comme si une fine couche de fils d’araignées s’y était déposée.

« Si nous la retrouvons encore vivante et de notre monde, je ne m’y oppose pas. »

Elle se déplace, juste à côté de M.Chokowski mais l’odeur de vomi monte violemment à ses narines. Elle est bien trop sensible aux odeurs dans son état.
Le mieux serait de trouver un fauteuil vide pour transporter MissFoldingue. Elle en voit un à moitié dans le noir, vide. Celui de l’homme qu’elle vient d’assassiner froidement sans doute.
Le fauteuil est à demi dans l’ombre. Ce qui ne la dérange pas. Si elle le prend elle devra sans doute pousser Murdoch Tueuse à la Morale d’Innocente. Ce qui la dérange.

« M Chokowski, vous pourriez peut-être prendre ce fauteuil pour … vous. »

Elle désigne Enid d’un mouvement de la tête. Elle ? La moralité d’une petite cuillère ? Non mais.
Pourtant une petite voix à l’intérieur d’elle lui souffle que sa moralité est sans doute bien plus déviante que celle inexistante d’une petite cuillère.

Vitold Chokowski
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Un court, très court instant, il a cru apercevoir la baignoire. Le reste s’est enfoncé dans l’émail blanchâtre de cette dernière. L’enfant, la course de Valentine, la langue acide du vieillard sur la plaie d’Enid et l’acte fou mais naturel – sanglant – de la jeune femme. Quand son nom retentit pour la seconde fois, Vitold s’éveille, tiré d’une ombre plus profonde, plus lancinante. Conscient, soudainement, d’avoir eu envie de suivre Valentine vers le grognement guttural. De ne plus seulement être une aide pour le chaos mais une aumône, un sacrifice.

Sauf que cela doit attendre – Crapaud attend en bas, certainement aussi terrifié qu’il se sent l’être – terreur ? Le sentiment est nouveau, palpable dans sa main moite. Mais il hoche la tête, livide, écoeuré par l’odeur du vomi, par la pisse. Et attrape d’un geste sec le fauteuil roulant abandonné, évitant de songer ce qui a pu l’occuper.

« Installez vous mademoiselle et tâchons de raviver la lumière. Je suis navré, pour les clefs. » C’est bien cela, n’est ce pas, qu’elle lui a demandé ? « La journée a été longue. » Piètre excuse normalienne. Tout ceci pour se rattacher à un quotidien qui s’efface, brutalement, sous l’absurdité de l’évènement. Il aurait du soigner Crapaud dans son laboratoire – trouver une solution – ou tant pis, lui couper définitivement le doigt – le vieillard n’en est plus à ça près n’est ce pas ?

La peur, soudain, devient méchanceté. Pourquoi avoir suivi, pourquoi être venu, pourquoi leur faire confiance.

Et son regard noir se tourne vers les ombres. Responsables de ces murmures qui s’infiltrent en lui comme il pourrait se noyer dans du gasoil.

« De Lume et de vive. » Murmure-t-il, à leur esquisse et cet avertissement étranger, prière maternelle, semble soudain réchauffer son esprit. Maintenant, il se sent prêt.
Le Phare
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Fracas, désastre. Comme un coup de jus soudain dans le calme pesant de la nuit. Le patient s’est effondré, pantin disgracieux, reflet de mort au sourire figé. Juste une poupée manipulée par quelques voix espiègles. Il n’en reste que des fluides, un corps. Le claquement des semelles de Valentine, un peu plus loin, dans le néant.

Et si les masques tombent, si la Hurleuse semble reprendre le contrôle du petit groupe, un grand sinistre dans le sillage, les murs ne craignent rien ni personne. Lieu vivant, plein de ressentiment, habité par les fantômes et tous ceux qui l’ont traversé. Ce sont parfois les endroits qui sont hantés de notre présence et pas l’inverse. Et leur vie, leur existence bouillonnante éveille l’endroit, habite le lieu autrefois délaissé. Comme tous les patients avant eux.

Existe-t-il seulement un hôpital à Malfearn ? Que reste-t-il de Malfearn, tout compte fait ? N’est-ce pas simplement un rêve, un purgatoire peuplé de monstres et d’innocents. Et s’il avait fermé, depuis longtemps déjà ? Délire en série, hystérie collective. Les voix des murs chuchotent que cela serait amusant.

Jusqu’à ce qu’ils s’entredéchirent.

Dans ce chaos, seul le thanatopracteur semble garder un calme tout relatif. Insensible ou presque au venin de l’hôpital.

«  Vous avez vu un petit garçon ? » La voix de Valentine, toujours. Mais lointaine, et si proche à la fois. Peut-être sous le plancher ? Ou bien au-dessus du plafond. Tout à coup, les choses semblent avoir changé de place. Cet embranchement était-il là avant ? D’où viennent-ils ? Où vont-ils. «  Je cherche mon petit garçon. »

Au-delà de la lumière qui manque, des ténèbres qui menacent, c’est peut-être encore la disparition toute relative de la secrétaire qui se fait la plus improbable.


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Voilà la suite de votre situation. Vous êtes libres de poster comme bon vous semble et autant de fois que vous le souhaitez jusqu'au 29 Mars où la suite vous sera envoyée.

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Enid Murdoch
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« Ce qui nous sépare de ceux qui rôdent, Doc. On peut abandonner son intégrité pour presque rien, mais c’est tout ce que nous possédons réellement, tout ce qui nous reste à la fin. Même vous, vous devriez comprendre ça. »

Need sait que ce petit espace est le seul où l’on est véritablement libre.

Là-bas, aucune crainte de mourir, d’échouer et ou de souffrir.

Elle n’est pas innocente, Murdoch. Le sang qui dégoise de ses doigts de bourreau est de la sorte de celui qui, jadis, souillait Lady Macbeth.

Enfants, père et mère – sacrifiés pour une chanson et une couronne de fleurs. Être saine d’esprit n’est plus une option depuis des décennies – alors elle a trouvé d’autres règles pour diriger sa vie, d’autres rituels pour repousser les derniers jugements.

Elle serait le limier, celui qu’on laisse à la porte, la faim à la gueule, alors que l’ombre mange la cour devant la maison, que les loups rôdent dans les accrocs de la nuit, que les monstres se terrent sous les lits.

C’est le dernier fantôme de sa probité en déroute.

C’est la ligne qu’elle ne franchira pas.

Surtout pas par lâcheté, auto-conservation ou égoïsme.

Le triangle qu’ils composent n’a pas les angles de l’innocence. Il n’y a rien à sauver, ici. Tous sont touchés par la phalange impie du démon de la perversité.

Valentine, elle, est d’une autre trempe : enfant perdu, princesse déchue, victime sacrificielle – qui serait-elle pour la l’abandonner aux ténèbres ? Qui seraient-ils une fois la lumière revenue et les créatures bien sagement retirées dans les ombres ?

La chaise l’attend. Elle en perçoit la noirceur de rouille et de nuit. Sa paume effleure le cuir éraflé, l’oxydation du métal rappe contre ses phalanges.

Elle est tentée. Après tout, Vitold est affable, et elle est si fatiguée… Il l’appelle presque. Combien ont-ils été à s’y laisser mourir ? Il suffirait de poser son cul sur ce trône malade et de se laisser glisser jusqu’à quoi ? Le prochain escalier où l’on voudrait bien la précipiter ? La prochaine gueule où l’on daignerait l’enfourner.

Si le chevreuil s’attarde…

Alors, elle arrache simplement le fauteuil des mains de son hôte avant de le fracasser contre le mur. L’écho se répercute étrangement dans les entrailles labyrinthiques de l’antique bâtiment.  La tête lui tourne et elle s’appuie contre la peinture écaillée, épaule douloureuse contre paroi pulsante, pour avancer.

« Si vous devez m’abandonner, je préfère encore être sur mes deux jambes. N’y voyez rien de personnel.»


Tout ce qu'elle sait c'est que les enfants perdus sont dévorés et que le seul moyen de survivre et de ne pas se séparer.

« Commençons par rallumer ce foutu générateur et trouvons notre secrétaire en déroute. »

Ils se sont arrêtés devant l'intersection.

Où est le Minotaure ?



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03.1994
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Lèvres pincées, regard perçant presque cruel. Sybil oscille. Tic démon en puissance. Tac apparition bien fragile. Tic humain guérisseur. Tac créature aux formes arachnéennes ou reptiliennes Tic tac tic tac. Le pendule va de l’un à l’autre, se rapprochant parfois d’un Augure dont elle voudrait dévorer l’esprit encore sain. Se rapprochant parfois d’une humaine couillue et hargneuse ou d’un être baignant dans le mysticisme. Elle aurait aimé être l’un d’eux, être comme eux. La voilà donc oscillante, cette sombre pensée la fait vaciller, loin du mépris, de la colère, de la peur, des sentiments. Elle a le sentiment de flotter.

Difficile de se raccrocher à qui on est quand on ne sait pas qui on est. Difficile de s’accrocher à ce que l’on voit quand on est dans la tanière des ombres. Difficile de se fier à ses amis quand ils ne sont que des fragiles inconnus emplis de leurs propres tentations.
On joue avec Sybil et ce n’est pas de son goût. Ce n’est pas la hurleuse ni le mystique. C’est Malfearn, le Malfearn qui l’attire et la repousse. Elle se sent vulnérable, coincée dans l’intestin d’un monde qu’elle ne connaît pas. Une petite araignée a fait sa toile dans son oreille, cela lui fait du bien de moins entendre la voix de Valentine et le claquement de ses talons. Si elle les laisse faire les esprits de cet hôpital surnaturel, si elle se laisse faire, elle va bientôt s’enfermer dans son propre cocon, la soie collante va l’entourer entièrement, la protéger. Les toiles finiront par les engloutirtous les trois. Elle sent déjà les quelques fils de ses protégées qui sont parties dans les couloirs.

Sa mère est une combattante, une augure experte qui sait toujours quoi faire pour s’en sortir et protéger les siens. Sa sœur a la flamme de ceux qui en auront toujours plus, allant au-devant des ennuis. Jo a les réflexes d’un soldat, le caractère guerrier et elle n’a peur de presque rien. Son père était tout cela à la fois, avec un supplément d’âme. Sybil n’est qu’une créature égoïste, démunie, qui n’aime rien de plus que son jardin secret, qui a peur d’elle-même. Elle ne sait pas se battre, pas consciemment, seulement créer le chaos autour d’elle, empoisonner, piéger. Pourtant un instinct lui dit qu’il ne faut pas rester immobile. Il vaut mieux s’accrocher à la folle énergie kamikaze d’Enid.

Enid qui définitivement ne comprend rien aux intentions de Sybil, projette le fauteuil avec une force qui semblait l’avoir quitté.

Sybil serre les dents. C’était bien pour la sauver et ne pas l’abandonner qu’elle voulait la faire asseoir. Décidément. Elle ne sera donc que le grand méchant loup dans l’histoire des hommes. Heureusement qu’il y a Jo pour griser les frontières entre le bien et le mal.
Enid est une adulte, elle fait ses choix. Sybil ne se battra pas. Elle regarde seulement le grand homme élégant qui, elle ne saurait le dire autrement, semble aspiré par autre chose.
Elle aimerait poser la main sur son épaule pour le garder auprès d’elles. Il ne doit pas partir comme Valentine. Mais sa main reste désespérément contre son flanc. Seule sa voix se fait rassurante.

« Restez avec nous M.Chokowski. »


Puisqu’il faut sortir de là, autant être active. Sybil ouvre une porte au hasard. Ses petites bestioles s’engouffrent dans la suite du couloir, reliées à elle par de blancs filins invisibles dans la pénombre. Peut-être que ses pièges marcheront ? Elle espère sincèrement que le vibrato de la soie touchant une proie la préviendra d’un danger. Si elle pouvait être complètement elle-même, embrasser sa nature, cela irait plus vite. Elle glisserait rapidement d’une porte à l’autre, discrètement, cherchant sa proie ou une sortie. Son corps humain, les besoins de se conformer aux us et coutumes d’une réalité à laquelle elle n’appartient pas, tout cela la freine. Il faut faire avec.


« Le générateur pourrait être partout… »


Le constat est sans appel, ce n’est plus l’hôpital. Même si ça l’était, elle ne connaît pas la salle des machines. L’autre solution est de suivre Valentine, s’enfoncer plus profondément encore dans la noirceur et prendre le risque de ne plus en sortir. La voix de Valentine est partout mais si elle a été aspirée par les esprits de Malfearn elle sera sans doute au plus profond des ténèbres. La loi de la gravité.

« Sinon nous pouvons aller encore plus loin ? »


C’est presque comme si elle en avait envie, comme si elle les y amenait. Mais dans ce groupe, ce n’est pas elle qui guide, elle le sent bien, et c’est mieux comme ça. Pourtant, ce qui reste d’ego en elle ne demandera jamais à Mme Murdoch, le nom lui écorcherait la langue, de prendre ses responsabilités et de les mener en dehors de ce guet apens.


Le Phare
Porteur de lueur
Le Phare

Panique à St. Madeline

@Vitold Chokowski , @Enid Murdoch , @Sybil Blackwood

03.1994
tw : blessures
La Hurleuse repousse le présent salutaire aussi sûrement que l’endroit tout entier repousse leur présence. Quelque chose ce soir a brouillé les frontières. Provoqué la rage vorace de l’hôpital. Un grain de sable dans le mécanisme, trois fois rien. Il n’en faut pas beaucoup à Malfearn, pour que tout se détraque tout à coup. Pour un rien. Et toujours violemment.

Du fameux Minotaure, il n’y a qu’un souffle. Un mugissement lointain et métallique dans le dédale qui n’en finit pas. Dans cette pénombre, cet inconnu, il n’y a peut-être que le thanatopracteur qui trouve sa place en silence, attend que l’orage passe. Parfois, il n’y a pas grand-chose de mieux à faire. Parfois, à Malfearn, mieux vaut fermer les yeux, subir. Ne pas trop poser de question. Attendre que les choses se calment ou que la mâchoire daigne enfin inexorablement se refermer.

Et il y a ceux, comme Enid, ou Valentine, plus simplement encore, qui se débattent. Ou ceux comme la chose arachnéenne, tout de blond tissée, qui ne veut que comprendre, se fondre à l’étrange qui l’a enfantée.

Valentine serait le lapin blanc. Dans sa blouse immaculée, guidant les Alices de fortune à travers un labyrinthe sinistre. Dans le couloir qui les a précédés, les murs semblent avoir été repoussés. Quelques brancards oubliés ont rejoint le plafond ou les parois, à la verticale. Malformation clinique de la réalité. Une routine dans le coin, à ce qu’on dit.

Et si le pas du lapin blanc disparaît, si le tic-tac e sa montre s’éloigne à leur oreille, rend la progression moins aisée, plus hasardeuse, c’est un autre bruit qui monte, éclate comme tout proche. Peut-être derrière un mur ou un autre. Vraiment proche. Tout à côté. À portée de main.

Les pleurs d’un enfant.

La voix de la secrétaire, qui glapit au loin, intelligible.

Des éclats de presque rien pour les guider.

S’enfoncer plus loin dans le ventre de la bête.

Jonas dans le ventre de la baleine.

Pas d’autre choix.


Hors RP




Voilà la suite de votre situation. Vous êtes libres de poster comme bon vous semble et autant de fois que vous le souhaitez jusqu'au 26 Avril où la suite vous sera envoyée.

Comme toujours, nous sommes disponibles par mp pour vous aiguiller au besoin et quelle que soit la question. À bientôt !
Enid Murdoch
Enid Murdoch

Panique à St. Madeline

@Vitold Chokowski , @Enid Murdoch , @Sybil Blackwood

03.1994
tw : blessures, vulgarité, description graphique
« On le retrouvera si Sainte Madeline le veut. »

Le constat est sans appel. S'obstiner ça reviendrait juste à se casser les dents. L'Hopital se prenait pour dédale -

Need emmerde les labyrinthes.

Déjà toute môme, elle les trouvait chiant et même – pardonnez-lui l’expression - un brin m'as-tu-vu  – le genre de gus qui se la joue rebelle de la forêt à se donner des airs de gros durs chaotiques, avec ses pièges mortels, ses passages fragmentés et ses culs-de-sac. Alors qu’en fait, en dessous de tout ce fatras de fausses pistes, c’est très clair que ça a été conçu pour vous baiser jusqu’à l’os.

Celui qui s’étend devant leurs prunelles effarées en fait des caisses. Enid note qu’il a peaufiné son style : brancards avalés par l’enduit lépreux du plafond où une épaisse couche de moisissures se dispute avec des éclaboussures d’un liquide brunâtre, treillis en acier rouillés sous leurs pieds, chaises roulantes encastrées en échardes tétaniques dans le carrelage des murs.

Manquait plus qu’un accort paillasson pour leur souhaiter la bienvenue en enfer, histoire de parachever l'effet pandémonium.

Pas de possibilité de faire demi-tour. Sainte-Madeline, en bonne hôtesse, a fait en sorte que l’unique issue s’offre une attaque des clones en bonne et due forme. Impossible de se souvenir de l’obscurité et de l’errance qui les ont poussés dans le ventre de la Bête. C'est à se demander comme ça arrive à se caler autant de mètre cube dans le paletot. Puis ça lui rappelle un truc. Dans le milieu, ça parlait souvent d’un gars – un certain Will Navidson qu’avait été englouti par sa propre baraque après qu’elle s'est mise à avoir les mêmes velléités de grandeur.

La jeune femme soupire de lassitude. C’est qu’elle serait pas étonnée qu’un cénobite leur tombe sur le râble au détour d’un couloir.

A la place, c’est le chiard qui reprend sa sérénade.  
La migraine est en bonus, la maison régale.

Lui, y’a rien de plus certain que c’est le genre à faire les pires dingueries, vous cracher des immondices à la tronche et à tenter de vous planter un surin dans le buffet avec le sourire ingénu accroché à ses lippes innocentes.

Vous ai-je déjà dit qu’Enid détestait les enfants ? Autant que les otites qui vous refilaient sans crier gare. Ca serait bien la guigne si, à distance, l’engeance morveuse lui en avait refilé une. Pourtant, y’a comme une sensation désagréable, un corps étranger qui semble s’être logé dans son conduit auditif. Elle s’ébroue comme un cheval contrarié. Est-ce qu’une créature est-en train d’y pondre sa progéniture ? Ou bien dans l’esgourde de l’un des camarades d’infortune ?

Enid, elle les toise. Leur souffle, ça va ça vient, des spirales comme des rêves dans la lumière jaunâtre et crade de la lampe. Vitold reste de marbre, les boursoufflures de réalité frelatées ça lui glisse dessus, comme l'eau sur les plumes d'un canard. La Hurleuse le regarde, presque jalouse de son foutu flegme, utile ou mortel, allez savoir. La Doc est ailleurs, happée par ses pensées, tirée par des liens qu'on voit pas, qui la pousse dans des sens contraires.

Les minutes, elles filent dans un silence qui se bagarre avec le bruit de ferraille de leurs godasses et les sanglots qui craquent. Need, elle compte les brancards pendus au plafond, pour ce que ça vaut, dans ce brouillard épais qui vous bouffe l'esprit et vous pousse à la connerie.

C'est peut-être ça, oui, cette saloperie d’usure mentale qui a failli avoir la peau de Sybil. Un moment tout est calme, et puis… La rouille, elle cède, et le néant, ce salaud, il écarte ses mâchoires juste devant ses pompes grand teint. En bonne Hurleuse,  Enid fait un bond en avant, l’adrénaline coulant à flots dans ses veines. Elle se jette et saisit la Doc par le col, la tire en arrière, juste à temps, alors que le vide, ce bâtard, il bâillait déjà pour l’avaler.

Elle est restée plantée là, le souffle coupé, les jambes en coton, les yeux grands ouverts sur le précipice qui a failli les bouffer toutes les deux. Et ses doigts, à peine ils ont frôlé la peau de la toubib, que ça lui a filé un frisson de mort, une glaciation qui lui grimpe le long de l'échine. Des écailles de terreur, des toiles de colère, des crochets d'hostilité qui s'accrochent à sa peau. Alors, elle prend tout en pleine gueule, écrasée sous le poids de ces émotions qui veulent pas dire leur nom. Sa main, elle la retire vite fait, comme brûlée au un fer rouge.

Et puis, comme par un tour de magie macabre - une diversion salutaire -  le gouffre se refait une beauté. Les bords se tordent, ils grincent, et voilà que l'acier rouillé, il se met à pousser, à s'étirer, à former des marches, un escalier circulaire qui descend, qui invite aux ténèbres. C'est un appel, un défi jeté à leur courage. Plus le temps de se perdre en palabre. Il faut avancer. Enid, elle regarde l’assemblée, un sourire tordu aux lèvres, « Allons faire la peau au Lapin Blanc. » qu'elle dit, et sans attendre la réponse, elle pose le pied sur la première marche.  De temps en temps, entre les chialeries du môme et les appels de Valentine, un grondement, sourd et profond, peut-être le vent, peut-être la terre qui bouge, résonne dans le fer et la pierre. Ca leur confie qu'ils sont pas seuls ici. Et là-haut, perdurent le craquement lointain de ce qui a été, des portes qui se rebiffent, des échos de pas précipités, des voix que le temps a étouffées.

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